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Cours Or & Argent

La BCE et John Law .

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Publié le 16 septembre 2016
1844 mots - Temps de lecture : 4 - 7 minutes
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Rubrique : Editorial du Jour

Durant les semaines écoulées, la BCE s'est enfoncée plus loin encore dans sa folie monétaire, pour porter les taux de dépôt plus profondément en territoire négatif.

Elle a élargi son programme d'assouplissement quantitatif, qui concernait jusqu'à présent les obligations souveraines, pour inclure les obligations de qualité, et a porté le rythme de ses achats 80 milliards d'euros par mois. La BCE a également promis de payer les banques pour accepter des crédits de sa part dans le cadre de ses « opération de refinancement à plus long terme ».

Tout Français doté d'un minimum de connaissances de l'histoire de son pays devrait s'en trouver alarmé. La BCE gère l'argent et les actifs de la zone euro de la même manière que John Law a géré la Banque Générale Privée (rebaptisée Banque Royale en 1719), qui était responsable de ceux de la France entre 1716 et 1720. L'idée de base était très simple : utiliser le monopole de création monétaire de la banque pour faire grimper la valeur des actions de la Compagnie du Mississippi grâce à la monnaie papier créée à ces fins. Le Duc d'Orléans, régent de France pour le jeune Louis XV, a accepté son offre parce qu'elle promettait aux Bourbons les fonds dont ils avaient tant besoin.

C'est à peu près ce que fait la BCE aujourd'hui, mais sur une échelle bien plus large. Le besoin des gouvernements en financements est d'une grande importance aujourd'hui, comme à l'époque.

A l'époque de Law, la France ne disposait pas de banque centrale telle que la Banque d'Angleterre pour gérer la dette de son pays, et encore moins d'un marché d'obligations gouvernementales. Les dépenses excessives de Louis XIV ont plongé son pays dans une dette de trois milliards de livres, soit l'équivalent de 1.840 tonnes d'or. Cela représentait alors 85% des réserves d'or disponibles à la surface de la Terre, au taux de conversion du Louis d'or. John Law a fait doubler ce chiffre avant juin 1720, grâce aux livres non-garanties par l'or imprimées par sa banque.

Aujourd'hui, les actifs surévalués au bénéfice des gouvernements sont les obligations gouvernementales elles-mêmes. Mais le principe est le même. Nous n'avons pas besoin d'un véhicule monétaire similaire à celui de la Compagnie du Mississippi, parce que nous disposons d'un marché des obligations en parfait état de fonctionnement.

La Banque Générale a créé le crédit bancaire dont avaient besoin les classes moyenne et supérieure de la France pour acheter les actions de la Compagnie du Mississippi, faisant de leur hausse de prix une conséquence inévitable. Law a mis en place une machine de création monétaire pour ceux qui disposaient d'un capital suffisant, mais le versement initial de 10% nécessaire à une inscription pour les actions Mississippi a également rendu la spéculation disponible aux classes de servants. La conséquence en a été que tout le monde à Paris a attrapé la fièvre spéculative, ce qui a fait flamber les actions Mississippi depuis un dépôt de 15 livres jusqu'à 18.000 livres en juin 1720. Le terme « millionnaire » date de cette époque.

Aujourd'hui, la BCE procède quelque peu différemment, et crée de la monnaie pour acheter der obligations gouvernementales aux banques pour permettre aux gouvernements de continuer de dépenser sans risquer de crise de financement. Les régulations bancaires de Bâle III, qui exemptent les banques d'appliquer une pondération de risque aux obligations gouvernementales, s'assurent à ce que les obligations soient beaucoup demandées en tant que collatéral, et garantissent à ce que les banques continuent de les acheter.

En revanche, comme pour la combine de Law, la BCE a constamment besoin de nouveaux investisseurs pour empêcher le marché de s'effondrer, c'est pourquoi elle a pris la décision d'élargir son programme au-delà de la dette souveraine en achetant également des obligations de qualité. Et puisqu'elle peut créer de la monnaie à partir de rien, elle verse des intérêts aux banques commerciales pour lui emprunter des fonds, et s'assure ainsi que toutes les obligations achetées dans le cadre de ce programme continueront d'être alignées aux taux d'intérêt négatifs.

Comme c'était certainement le cas en 1720, l'expansion du crédit est généralement perçue comme une assez bonne chose, voire une nécessité pour les Etats de la zone euro. Mais ne vous laissez pas embobiner. Pour que ces programmes puissent continuer, toujours plus de crédit devra être émis, et toujours plus d'obligations devront être achetées pour empêcher la bulle sur les obligations de dégonfler. C'est là la véritable raison derrière les actions de la BCE. Et parce qu'elle ne pourra pas poursuivre ses programmes indéfiniment, la bulle finira par éclater.

La bulle du Mississippi a éclaté quand la France n'a plus pu lui fournir suffisamment d'acheteurs pour lui permettre de gonfler. Il vient toujours un moment où la tentation d'enregistrer des profits pour acheter une maison de vacances ou une résidence à Paris devient trop grande. Quand la bulle du Mississippi a éclaté, les ventes ont accéléré. A la fin de l'année 1720, la Banque Royale, telle qu'elle avait été rebaptisée, a fait face à des propriétaires d'obligations en colère qui ne pouvaient plus échanger leur papier contre des espèces. Une fois que la panique a commencé, la combine a rapidement été dévoilée.

Il semble extraordinaire qu'en économie, les idées chimériques trompent si souvent les analyses raisonnées et le bon sens. Les idées fausses qui ont poussé la BCE à mettre en place ses politiques délirantes sont les mêmes que celles qui ont influencé John Law. Dans les deux cas, tout a commencé par croire que le devoir de l'Etat était de s'assurer de la disponibilité de la monnaie et du crédit et de libérer la population des contraintes du marché libre. Dans les deux cas, les idéologies se sont ajustées en conséquence aux  problèmes nés de l'expansion monétaire. Et dans les deux cas, une expansion monétaire accrue est devenue la seule solution appliquée pour résoudre les problèmes. De la monnaie a dû être déployée simplement pour maintenir à flots les gouvernements en banqueroute.

Nous devrions ignorer toutes les autres raisons, justifications et excuses avancées pour expliquer ce qui s'est passé, parce que l'Etat français a employé Law pour gérer sa banque, et que les gouvernements européens ont créé la BCE. Le servant sert toujours son maître. La Banque Royale a succombé à une panique bancaire, et la BCE continue de tenter d'apaiser son système bancaire qui, si la bulle des prix des actifs venait à éclater, s'effondrerait certainement. En ce sens, la BCE n'en est pas encore là où en était la Banque Royale quand elle s'est renversée, mais elle s'en approche dangereusement.

En zone euro, tout le monde pense que la BCE est toute-puissante, parce que croire le contraire serait impensable. C'était aussi vrai pour la Banque Royale. Jusqu'à ce qu'elle s'effondre. Ce n'est pas une perte de confiance en la banque qui a été responsable de son effondrement, mais ses difficultés à maintenir la bulle. La leçon à en tirer est qu'une perte de confiance n'est pas nécessaire à la destruction de la BCE.

Imaginons un instant que la bulle sur le marché des obligations éclate et que les prix commencent à se normaliser. Nous savons qu'il n'en faudra pas beaucoup pour que les pertes générées soient suffisantes pour détruire le capital de banques commerciales importantes, mais le problème est très certainement dans l'esprit de la BCE. Très peu de gens semblent se rendre compte de la crise que la chute des prix des obligations génèrerait pour la BCE.

Au 31 décembre 2015, les fonds propres de la BCE s'élevaient à 7,74 milliards d'euros, pour des bilans de 256,645 milliards d'euros, soit un facteur de 33. Les comptes les plus larges du système euro, où s'accumulent les achats d'actifs, disposent de réserves de capital de 98 milliards d'euros pour des bilans de 2.872 milliards d'euros, soit un facteur de 29. Une hausse des taux d'intérêt de moins de 2%, qui les porterait à 1,5%, ferait s'effondrer la valeur des obligations et les risques qui y sont liés, au point que la BCE et la zone euro n'aient plus d'autre choix que de procéder à davantage d'injections de capital. Pour remettre les choses dans leur contexte, si les rendements à maturité des obligations à cinq ans passaient à 2%, leur prix plongerait de 10% environ.

Voilà pourquoi la bulle sur la dette de la BCE ne doit pas éclater. La raison n'est plus le soutien de la croissance économique. Si la bulle dégonflait, elle emporterait avec elle la BCE et le système euro, de la même manière que la bulle sur Mississippi a emporté avec elle la Banque Royale. Dans les deux cas, la confiance en ces institutions se reflète au travers du pouvoir d'achat de la monnaie qu'elles émettent.

Il ne se passerait pas beaucoup de temps avant que les propriétaires étrangers de devise européenne ne visualisent Draghi sous une perruque poudrée, vêtu d'un jabot de dentelle et d'un long manteau de velours. Et ils partiront à la recherche de sécurité, parce que les fantômes des économistes monétaires du XVIIe siècle peuvent aussi être aperçus aux commandes d'autres banques centrales. A l'époque de John Law, la solution était simple, comme l'a montré le banquier Richard Cantillon. Il a enregistré ses profits assez tôt et vendu ses livres contre de l'or.

Cantillon, qui était l'équivalent d'un banquier d'investissement actuel, a non seulement su profiter de la bulle sur Mississippi, il a aussi prêté de grandes quantités de livres fiduciaires aux fortunés de Paris et accepté des actions Mississippi en tant que collatéral. Avant l'effondrement, il a eu la sagesse de vendre ses propres actions contre de l'or. On dit même qu'il aurait secrètement vendu le collatéral qui lui avait été offert, pour l'échanger contre de l'or. Cantillon a ensuite passé la frontière pour s'installer en Italie avec ses réserves de Louis d'or.

Après l'effondrement, il est rentré en France et a demandé à ce que la dette qui lui était sue lui soit remboursée. Il est probablement devenu le roturier le plus riche de l'Histoire, et le plus impopulaire de Paris. Contrairement aux banquiers d'investissement d'aujourd'hui, il a établi sa fortune alors que tout le monde se trouvait appauvri.

Personne ne peut dire avec certitude ce qui apportera la fin de la BCE et de l'euro. Ce pourrait être les difficultés financières d'un Etat membre, comme l'Italie, l'Espagne ou même la France. Ce pourrait être une menace d'éclatement de l'Union européenne, comme par exemple la sortie du Royaume-Uni et ses conséquences sur l'unité européenne. Le problème de l'immigration musulmane est aussi souvent cité comme une menace pour le projet européen. Il se pourrait aussi que la cause provienne de l'autre bout du monde. La Chine pourrait faire flamber les prix des marchandises et générer une inflation des prix en zone euro, ce qui exposerait les marchés européens des obligations au risque d'une hausse des taux d'intérêt.

L'évènement déclencheur pourrait tout aussi bien être inidentifiable. Contrairement à l'issue qu'a connue la fraude de la Compagnie du Mississippi, tout pourrait se terminer par la perte de souffle des marchés des obligations de la zone euro.

 

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Bref, on sait que ça va passer à travers, mais ni quand ni pourquoi, c'est peut-être ce qui en fait le charme!!!
Les choses seront-elles si différentes qu'en 1720? Pas sûr, même si nous avons Internet maintenant. Qui lit de tels articles? Qui est capable de comprendre le dessous des cartes? Bien peu de monde.
Les John Law modernes feraient bien de se rappeler que notre écossais est mort dans la dèche et qu'il vaut mieux être un Richard Cantillon qui a su s'adapter à un système et le comprendre plutôt que d'en être l'instigateur.
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Bref, on sait que ça va passer à travers, mais ni quand ni pourquoi, c'est peut-être ce qui en fait le charme!!! Les choses seront-elles si différentes qu'en 1720? Pas sûr, même si nous avons Internet maintenant. Qui lit de tels articles? Qui est capabl  Lire la suite
merisier - 16/09/2016 à 20:34 GMT
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