Les historiens du futur,
lorsqu’ils feront cuire leurs brochettes de rat au-dessus de leurs feux de
camp, se pencheront sur l’année 2016 sans jamais pouvoir comprendre ce qui est
arrivé à la république zombie qui est tombée en grignotant sa propre
cervelle. Notre Deep State grotesque passe d’une mésaventure de gouvernance à
une autre, consommant au passage ses échappatoires possibles dans une folie
autophage, responsable de la grande nausée qui se propage aujourd’hui sur le
territoire.
Président Trump –
vraiment ?? Nous aurions de la chance si la situation ne se terminait
que par une révolte des généraux et ne faisait s’envoler en fumée que deux
siècles d’héritages institutionnels. Nous ne pouvons cependant pas nier le
fait que le Deep State ait besoin d’être piétiné, noyé et passé à
l’essoreuse. Le plus triste dans tout ça, c’est que le travail aurait pu être
fait par des hommes de caractère, mais la génération tant vantée des baby-boomers
n’est parvenue à en produire aucun, tout comme la génération X qui arrive
aujourd’hui au pouvoir. Si ces personnages hypothétiques existaient, pourquoi
resteraient-ils cachés du regard du public ?
Nous avons bien Bernie, après
tout. Nous devrions accorder quelque crédit à ce croisé solitaire qui
s’oppose seul au Deep State, et à celle dont le « tour » ne doit
pas être oublié dans l’alternance de la gestion des rackets gouvernementaux
qu’est devenu notre monde politique. Il l’a traînée dans la boue au cours des
trois compétitions primaires de ce weekend, et l’a tant battue en termes de
votes qu’elle doit à l’heure où j’écris ces mots souffrir d’une terrible
gueule de bois existentielle. Les âmes des super-délégués du parti démocrate
traversent elles-aussi des heures sombres à contempler le manque de charisme
d’Hillary. Mais pour autant que j’admire le courage de Bernie, ses théories
vieille-gauche de redistribution de capital ne me convainquent pas – bien que
la question de la gestion de nos richesses dilapidées soit au cœur de nos
problèmes. Sa nomination s’inscrirait dans les annales des plus grandes
improbabilités de l’Histoire.
Ce dont on entend beaucoup
parler en ce moment, c’est de la division profonde des électeurs en termes de
sexe : les hommes s’attroupent autour de Trump (ou de Ted Cruz), alors
que les femmes suivent partout les costumes bleu azur d’Hillary. Oui, nous
assistons à une guerre nationale des sexes. C’est tout ce qu’il nous manquait
pour que tout s’écroule enfin. Cette triste division n’est pas une
conséquence du féminisme, comme beaucoup semblent le penser, mais de l’échec
des mâles américains. La preuve en est bien évidemment l’ascension de Trump,
personnage politique aux phrases choc et au sérieux digne d’un bouchon de
radiateur. L’Histoire se répète, la première fois sous forme de tragédie, la
seconde sous forme de farce – merci à toi, Ô Karl Marx, grand faiseur de
zizanies, et à tes luttes légendaires.
Ce qui fera finalement tomber
le Deep State ne sera pas un sauveur en armure, brandissant une lance du haut
de son cheval blanc, mais les terribles conséquences de l’implosion
financière qui approche à mesure que s’écoulent les saisons. Quand la
confiance en notre monnaie et en les instruments qu’elle représente aura
disparu, mieux vaudra ne pas regarder en bas. Le système bancaire
international est tant fissuré que la vue commence à rappeler un lac gelé à
l’arrivée du printemps. Quand les escrocs ne seront plus capables d’encaisser
leurs chèques, ils se trouveront immobilisés. Et quand ils le seront, tout le
reste le sera aussi, sans oublier votre capacité à acheter des pizzas
surgelées.
Trump, Cruz, Hillary et Bernie
nous indiquent que notre pauvre nation paralysée a besoin de traverser une
phase de convulsions pour se débarrasser des idioties toxiques de notre ère.
Soyez prévenus : il pourra s’agir de la plus grande révolution de
l’Histoire, tant la couche de crasse est épaisse. Trump et Hillary
ressemblent à deux fistules géantes qui bouchent les intestins nationaux. Bien
entendu, de nombreux américains ne souhaitent pas que leur nation meure sur
les toilettes comme l’a fait Elvis. Que lui resterait-il de sa dignité ?
En le nom des Pères fondateurs, que quelqu’un aille chercher une poche à
lavement baryté.
Des évènements nous attendent
encore, tapis dans l’ombre et menaçants tels des pièges à ours, sur le chemin
de la grande « Décision de 2016 », comme les chaînes de télévisions
aiment à appeler les élections. Quelque part à Londres, Singapour, Shanghai
ou New York, un jeune trader sur le Forex est sur le point d’appuyer sur le
bouton qui déclenchera la grande avalanche des produits dérivés… si deux
frères islamistes d’un quartier de Berlin ne décident pas avant cela de se
vêtir un beau matin de vestes fourrées de Semtex…