Lorsqu’une banque centrale
comme la BCE impose des taux d’intérêt négatifs et un assouplissement
quantitatif sur son baillage, de drôles de choses se produisent.
Les investisseurs deviennent
avides de rendements au point d’entreprendre les actions les plus folles. Ils
courent désormais après 3 milliards d’euros d’obligations sur cinquante ans émises aujourd'hui par le gouvernement de la France. Leur
rendement ? 1,916%.
Ces obligations sur cinquante
ans sont achetées par des investisseurs institutionnels qui, en temps normal,
auraient été institutionnalisés.
L’impact des taux d’intérêt
négatifs ne se limite pas aux baillages sur lesquels ils sont imposés. Ces
investisseurs assoiffés de rendements iraient n’importe où pour en obtenir.
Ils attendent actuellement les nouvelles obligations libellées en dollars
émises par l’Argentine : 15 milliards de dollars, à maturité de cinq,
dix ou trente ans, qui devraient intégrer le marché la semaine prochaine.
Il s’agit d’un pays qui a été
en situation de défaut pendant 75 de ces 190 dernières années, dont en
2013-15, en 2000-04 et en 1980-92. Son prochain défaut pourrait survenir dans
dix ans. Puisque l’Argentine ne peut pas faire défaut sur ces obligations au
travers d’une dévaluation du peso, elle devra le faire à la manière
habituelle.
Mais les investisseurs ont
besoin de leurs rendements aujourd’hui. AU diable le risque de défaut. Ils
espèrent pouvoir se débarrasser de leurs obligations avant que le
gouvernement ne débranche la machine.
Il reste cependant quelques
points que la combinaison des taux négatifs et de l’assouplissement
quantitatif ne sont pas parvenus à accomplir.
Les consommateurs, que ce soit
au Japon, en zone euro ou dans les autres pays où ont été adoptés des taux
négatifs, continuent de refuser de devenir les esclaves de la dette en
empruntant pour pouvoir dépenser. Et ceux qui essaient de le devenir au
travers de leur carte de crédi réalisent vite que les taux zéro ou négatifs
ne sont pas encore arrivés jusque-là.
Une baisse des taux fait
baisser les remboursements immobiliers. C’est une bonne chose. Mais elle fait
aussi grimper les prix des maisons, et l’inflation des prix, ce qui fait
ensuite grimper le coût du remboursement des prêts immobiliers. L’ironie de
la baisse des taux : même maison, prix plus élevé, remboursements plus
importants. Et risques accrus.
Lorsque la construction tout
entière tombera en ruines, le prix de ces maisons baissera. Leurs
propriétaires se retrouveront à la porte. Une nouvelle crise financière
surviendra, qui sera réglée par davantage d’assouplissement quantitatif et de
taux négatifs.
Et les consommateurs ne
consomment pas plus.
Un grand nombre d’entre eux se
reposent sur les rendements de leurs portefeuilles d’obligations et de leur
épargne – directement ou indirectement, comme par exemple au travers d’un
fonds de pension. Ces consommateurs se retrouvent écrasés par les taux à zéro
pourcent ou négatifs. Alors ils réduisent leurs dépenses. Plus les taux
baissent, moins ils dépensent.
Companies – even
junk-rated ones – can pile on cheap debt. This has created unique
opportunities for US companies to sell junk bonds at ultra-low yields to the
financially repressed investors in Draghi’s Eurozone. By now, “reverse
Yankees,” as these bonds are called, dominate
issuance in the euro bond market!
Les sociétés – même celles
qualifiées de toxiques – peuvent accumuler de la dette peu chère. Ce qui a
créé des opportunités uniques pour les sociétés américaines de vendre des
obligations toxiques à faible rendement aux investisseurs financièrement
réprimés de la zone euro. Ces obligations dominent aujourd’hui les émissions
sur le marché européen des obligations.
Ces sociétés américaines
surendettées devront rembourser cette dette libellée en euros grâce à leurs
revenus en dollars, ce qui deviendra plus difficile encore quand le dollar
plongera contre l’euro. Ces obligations américaines, que l’on appelle Reverse
Yankees, sont le plus beau cadeau que Draghi ait pu faire aux corporations
américaines. Quand ces mines exploseront, elles se transformeront en un
nouveau fléau imposé par Draghi à ses baillages.
Les investisseurs sur
obligations japonaises souffrent eux-aussi des politiques de leur banque
centrale, et se mettent à chercher des rendements à l’étranger. Ils ont
attiré sur eux l’attention de Wall Street, qui leur vend une variété de
produits intéressants, à commencer par des obligations en yens garantis par
des obligations de dette collatérale de corporations toxiques américaines
libellées en dollars. Ouaip.
Les corporations américaines
sont les véritables bénéficiaires des politiques de taux négatifs.
Cela vient-il en aide à
l’économie, à la demande ou à l’inflation des régions à taux négatif ?
Non. Ces corporations n’investissent pas les revenus de leurs ventes
d’obligations sur des activités productives dans ces régions. Elles rachètent
leurs propres actions, versent des dividendes à leurs patrons, et à leurs
autres investisseurs. Si elles investissent, elles se tournent vers le
Vietnam, le Mexique ou d’autre pays à la main d’œuvre peu chère.
Ce qui nous laisse le
gouvernement, l’autre grand gagnant de ces politiques. Avec des taux négatifs
sur la dette des gouvernements, ces derniers sont payés pour emprunter.
L’absurdité des taux négatifs transforme un gouvernement en déficit en
gouvernement profitable.
Les acheteurs d’obligations en
paient le prix. Mais avant qu’ils ne le fassent, les gestionnaires monétaires
qui prennent les décisions seront passés à autre chose. Certains espèrent
vendre ces obligations à des taux plus négatifs encore et avant leur maturité
à des investisseurs plus idiots qu’eux, nommément aux banques centrales, qui
d’ici-là seront déjà propriétaires d’une grande majorité de la dette.
Quelles que soient les raisons
qui expliquent les taux négatifs et l’assouplissement quantitatif – qu’il
s’agisse du refinancement de sociétés surendettées, du maintien d’une bulle
ou de l’enrichissement d’une poignée d’individus, ou encore de permettre à
certains d’emprunter à des taux négatifs alors que les investisseurs se
retrouvent à payer la facture – le prétexte le plus publicisé est la
stimulation de l’inflation des prix à la consommation.
Et c’est un objectif qu’ils
ont manqué d’atteindre. Le Danemark a l’expérience la plus longue des taux
négatifs, qui remonte à juillet 2012. Comme Chris Lowe, de chez Bonner & Partners, l’a
démontré avec ce graphique, au cours de quatre années de taux négatifs,
l’inflation des prix à la consommation est passée de 2,5 à 0% :
« Un paysage
hostile » - c’est ainsi que Larry Flint, le PDG de BlackRock, a surnommé
l’environnement actuel d’investissement et d’économie. L’impact des taux à
zéro pourcent ou négatifs est « particulièrement inquiétant » et
aura « des conséquences financières et économiques potentiellement
dangereuses ». Lisez
ceci : Negative & Low Interest Rates Eat into Consumer Spending at
Worst Possible Time: BlackRock CEO Fink