1. Au prétexte que, dans le passé, ce qu'on dénommait "monnaie
métal" pouvait être l'objet d'abus ou de contrefaçons de la part des
particuliers (cf. Say,
Catéchisme de l'économie politique, 1815), les hommes de l'état
ont fait valoir un remède.
Ils se sont donnés le privilège de la production de "monnaie
métal" et obligés les particuliers à employer celle-ci, et seulement
celle-ci, dans les échanges de choses.
2. Du fait de l'innovation permises par les bons esprits, par la suite,
des banquiers ont émis des billets en papier (puis des comptes de dépôt
de toute nature) en proportion de la monnaie métal dont ils disposaient,
permettant les échanges de choses.
Mais, au prétexte que des banquiers pouvaient abuser de leur situation,
les hommes de l'état ont décidé d'organiser le secteur des banquiers, principalement
au XIXème siècle, en privilégiant une banque, la banque dite
"centrale", et en lui donnant le monopole d'émission des billets en
papier.
Les autres banquiers, désormais, "de second rang", sous tutelle
de leur banque centrale, une par pays, et les gens reçurent l'obligation
additionnelle d'employer les billets en papier.
Vilfredo Pareto a eu l'occasion de s'émouvoir de la décision en faisant
valoir que seule la concurrence pouvait s'opposer à la "facilité de la
production de monnaie" (cf. Pareto,
Cours d'économie politique, 1896-97, §345).
Qu'à cela ne tienne.
3. Dans la foulée, deux ans avant la création de la banque centrale des
Etats-Unis d'Amérique en 1913 - ce qu'on
dénomme la "Fed" -, Irving Fisher (1911) a eu l'occasion de
confondre "équation" et "causalité" dans un livre
intitulé The
Purchasing Power of Money (Its Determination and Relation to Credit,
Interest, and Crises).
Cela lui a permis de rationaliser, à sa façon, la vieille
"théorie de la quantité de monnaie" avancée sans précision.
Il n'a pas hésité à développer l'idée que la variation de la quantité de
monnaie (monnaie métal, billet en papier ou compte de dépôt) dans un sens
provoquait la variation des échanges dans le même sens, à certaines
conditions.
Le point a été repris par Milton Friedman et ses amis
"monétaristes" soixante ans plus tard, légèrement modifié (cf. Friedman,
1970).
Désormais, la variation de la quantité de monnaie dans un sens provoquait,
à court terme, la variation de l'activité ou du revenu des particuliers ou
des entreprises et, à long terme, la variation du niveau général des prix,
tout cela à certaines conditions.
Et ils en sont arrivés à parler d'"hélicoptère monétaire" qui
pourrait distribuer de la "monnaie" aux gens (cf. par exemple, Mark Thornton, mai
2016)...
Toutes les réglementations qui avaient été concoctés entre 1911 et 1971
par les législateurs nationaux et avaient contribué à détruire les monnaies
nationales étaient ainsi, purement et simplement, laissés de côté comme
s'ils n'avaient pas eu d'effet...
4. Aujourd'hui, la fantaisie continue de plus belle.
Aux mots près qui sont différents, il est question de "quantitative
easing process" ou d'"adoucissement de la quantité de monnaie"
par tel ou tel banquier central.
Tout se passe comme s'ils s'ingéniaient à développer mon texte de mai
2011 sur les alchimistes...
Tels sont les faits dont il faut pourtant s'affranchir avant qu'il ne
soit trop tard.