Indépendamment des clivages politiques entre pro et anti-Europe, l’exemple
du prochain référendum britannique sur l’adhésion à l’Union Européenne donne
visiblement des idées aux Français. Ainsi, une récente enquête de l’Université d’Edimbourg montre que 53%
des Français seraient favorables à une consultation populaire sur le maintien
du Royaume-Uni au sein de l’Europe de Bruxelles.
Au total, plus de 8000 personnes ont été interrogées en
France, mais aussi en Allemagne, en Pologne, en Espagne, en Irlande et en
Suède. L’objectif premier de l’enquête était de connaître le point de vue des
citoyens européens sur l’éventualité d’une sortie du Royaume-Uni de l’Union
Européenne (le fameux « Brexit »). Un scénario parfaitement
envisageable depuis qu’un référendum a été décidé pour poser
la question directement aux sujets de Sa Majesté Elizabeth II le 23 juin
prochain.
Hormis les Français, les Européens sont massivement favorables au
maintien de la Grande Bretagne en UE
Le premier enseignement de l’étude menée par les universitaires
d’Édimbourg, et non des moindres, c’est qu’une nette majorité des
Européens souhaite un maintien de la Grande Bretagne au sein de l’Union,
avec par exemple des scores de 73 % d’avis favorables pour les Allemands, 79
% pour les Irlandais, 80 % pour les Polonais, et jusqu’à 81 % pour les
Espagnols. La France en revanche, se montre plus partagée,
avec quasiment autant de contre que de pour.
Le deuxième enseignement c’est que tous les européens n’ont pas le même
intérêt pour la question du Brexit. Ainsi, si 53% des Français souhaiteraient
eux aussi être consultés par voie de référendum sur l’intérêt de garder ou
non la Grande Bretagne dans l’Union Européenne, les Polonais ou les les
Irlandais par exemple n’ont clairement pas envie d’un vote. Quant aux
ressortissants des autres pays (Allemagne, Espagne, Suède), la possibilité
d’un référendum n’est pas rejetée d’emblée mais ne parvient
pas pour autant à convaincre une majorité absolue de citoyens.
En fait, l’étude va plus loin et finit par démontrer que, si les Français
veulent effectivement qu’on leur demande leur avis, c’est parce qu’ils
ont du mal à être globalement favorables au maintien de la Grande Bretagne
dans l’Union européenne (23% d’indécis, 33% d’opposants, et
seulement 44% de partisans). D’ailleurs, il semble qu’il ne faudrait pas les
pousser beaucoup pour qu’ils envisagent aussi la possibilité d’une sortie de
la France…
Le Royaume-Uni en Europe : un mal nécessaire ?
Néanmoins, quant à la Grande Bretagne, les raisons de la relative hésitation
des Français tient peut-être à la perception qu’ils ont de l’apport du
Royaume Uni au processus européen. Et ils ne sont pas les
seuls. Ainsi, lorsqu’on pose la question des avantages à maintenir la
Grande Bretagne dans l’UE, moins de la moitié des personnes
interrogées en France comme en Allemagne estime qu’il n’y en a pas. Ou en
tout cas, que les inconvénients l’emportent sur les bénéfices. Un résultat
étrange et qui semble contredire les chiffres plus haut. Mais en réalité, l’éventuelle
sortie de la Grande Bretagne est surtout perçue comme néfaste à l’équilibre
européen dans son ensemble, lequel s’en trouverait fragilisé car un
Brexit pourrait en effet créer un précédent et entraîner le départ d’autres
pays. Pour autant la présence du Royaume-Uni en Europe n’est pas considérée
comme un avantage en tant que tel, et le pays est même regardé avec
suspicion, notamment en raison de ses relations particulières avec
les États-Unis.
Des relations qui ont d’ailleurs été récemment rappelées par le maire de
Londres, Boris Johnson, alors qu’il dénonçait lui-même la volonté affichée
par l’administration américaine de peser sur le prochain référendum. Une
visite de Barack Obama serait en effet programmée pour le mois d’avril en Angleterre, ainsi
qu’en France et en Allemagne, en vue d’éviter la sortie du
Royaume-Uni de l’UE.
Car Obama ne veut pas perdre son point d’entrée sur le continent européen
et il a besoin des Anglais pour appuyer par exemple certaines mesures
de « coopération commerciale » qui ont du mal à convaincre
le reste des États européens.
Bref, l’histoire dira si les Français ont été des visionnaires en se
montrant favorables au départ d’un « agent double » au sein de
l’Union européenne, ou s’ils se sont juste une fois de plus comportés comme
des râleurs impénitents qui aiment se faire des ennemis parmi leurs voisins.