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Keynes et Burke

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Publié le 01 mars 2013
607 mots - Temps de lecture : 1 - 2 minutes
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Rubrique : Or et Argent

 

 

 

 

Keynes est un auteur bien plus controversé que certains veulent bien l’admettre. Il était sujet à des contradictions et à de brusques « changements de cap », la question du libre-échange en étant le meilleur exemple.


Ses références idéologiques sont loin de se situer uniquement à gauche. Ainsi, on l’oublie souvent, mais l’économiste britannique a écrit, au début du XXe siècle, un ouvrage sur le conservateur libéral britannique, Edmund Burke, intitulé The Political Doctrine of Edmund Burke. Qu’est-ce que l’immoraliste, John Maynard Keynes, peut bien avoir en commun avec le conservateur Burke ?


Curieusement, Keynes se reconnaît en Burke sur de nombreux points. Tout d’abord, Keynes, comme Burke, a succombé aux charmes de l’élitisme. En ce point au moins, il n’est certainement pas socialiste puisqu’il estime que seuls des technocrates – et non le prolétariat – sont à même de gouverner un pays.


Ensuite, Keynes nourrit une certaine méfiance à l’égard des tropismes révolutionnaires. Rappelons, à toutes fins utiles, que Burke était un farouche opposant de la Révolution française. En cela, l’admiration de Keynes peut nous laisser circonspects lorsqu’on sait que ce dernier a amorcé une « révolution économique » ayant changé la face du monde…


Mais Keynes s’en explique : il est toujours dangereux, selon lui, de supprimer un bien présent pour un bien futur, tant le futur est incertain. En économie, il ne dit pas autre chose. Rappelons-nous, en effet, de sa fameuse phrase : « Le long terme est un horizon peu intéressant. À long terme, nous serons tous morts. ».


Keynes ne s’intéresse pas au futur, son attention est tournée exclusivement vers l’instant présent. C’est sans doute pour cela qu’il a une préférence marquée pour la consommation par rapport à l’épargne. C’est aussi pour cela qu’il affichait un tel mépris à l’égard des thésauriseurs. C’est enfin pour cela qu’il ne se souciait pas des conséquences budgétaires des plans de relance, financés par la dette publique, qu’il prônait. Pour paraphraser l’économiste britannique, Tim Harford, de tels plans de relance ne sont rien d’autre que des « taxes sur les adolescents » puisque la dette publique implique des intérêts élevés que ces derniers devront rembourser.


Par ailleurs, Keynes rappelait que les politiciens devaient se soucier du bien-être des populations présentes et non futures. En cela, il a été entendu par la plupart des hommes d’État qui, rappelons-le, optent presque toujours pour des politiques électoralistes, donc de court terme.


Il n’est alors pas étonnant que Keynes soit si hostile à certaines révolutions. Il ne veut pas sacrifier la stabilité du présent pour un projet politique illusoire dont les éventuels effets positifs ne se feront sentir que dans de longues années, voire des décennies. Sur ce point précis, il est difficile de lui donner tort, l’expérience nous ayant montré les ravages produits par certaines (la plupart ?) des révolutions.


Toutefois, cette méfiance vis-à-vis des révolutions paraît insuffisante pour caractériser de tels liens entre Keynes et Burke, d’autant plus que ce caractère antirévolutionnaire ne se fonde pas forcément sur les mêmes raisons : Burke était surtout atterré par la vague de violences qui secoua la France à partir de 1789, même si, politiquement, il était extrêmement dubitatif quant aux réelles intentions de l’Assemblée nationale française. En outre, il rappela que la France s’était déjà grandement libéralisée sous le règne de Louis XVI et que la « thérapie de choc » mise en œuvre par les révolutionnaires aurait un impact désastreux. Il se méfiait également des conséquences de la tyrannie de la majorité.


Voilà toute une série de raisons absentes de l’œuvre de Keynes. C’est bien pour cela qu’il faut minimiser les rapports idéologiques entre Burke et l’économiste britannique.

 

 

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