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Cours Or & Argent

L'imbroglio.

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Publié le 18 février 2017
1520 mots - Temps de lecture : 3 - 6 minutes
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Rubrique : Article du Jour

1. Le pouvoir des mots.

… "[...] les mots ont d'autant plus de pouvoir qu'ils ne sont pas définis.

Ce qui est défini scientifiquement n'a pas de de pouvoir sur l'opinion." (Guitton, 1979, p.31)

Telle était l'opinion de Henri Guitton sur les mots dont il fait part dans son livre intitulé Imperfections en économie (1979).

Cela ne doit pas cacher le recours croissant donné à telle ou telle mathématique à quoi ont procédé des économistes depuis lors et dont la majorité d'entre eux serait bien incapable de justifier leur choix mathématique pour ne pas parler des mots qu'ils font intervenir.

2. Les théories mathématiques.

Reste que, de leur côté, des mathématiciens sont arrivés à considérer que, pour démontrer un théorème, il n'était pas nécessaire ni même utile de savoir ce qu'il voulait dire.

C'est ainsi que, David Hilbert (1862-1943), grand mathématicien, pouvait soutenir que:

… "[...] les axiomes devaient être tels que si on remplaçait les termes de 'points', 'droites', et 'plans' par 'bière', 'pieds de table' et 'chaises', la théorie devait toujours tenir. [...]

Il ne fallait pas compter sur l'intuition pour combler les lacunes." (O'Shea, 2007

, p.169)

Dans ces conditions, on pourrait remplacer le géomètre par le "piano à raisonner" imaginé par Stanley Jevons, l'économiste de la double coïncidence des besoins..., avait souligné Henri Poincaré (1854-1912), autre grand mathématicien, tout en le regrettant:

"Il y a là une illusion décevante" (Poincaré, Science et méthode, 1908, p.4)

Pour sa part, Ivar Ekeland est convenu que :

" certains événements prédits par le modèle mathématique ne se produiront pas dans la réalité physique" (Ekeland, 1984, pp.52-53).

Ivar Ekeland (1984) Le calcul, l'imprévu (Les figures du temps de Kepler à Thom), Seuil, Paris.

Il a souligné humoristiquement à cette occasion que

« les mathématiques nous donnent une manière originale de réparer un pneu crevé : il suffit d'attendre qu'il se regonfle spontanément » (ibid., p.54)

Autrement dit, en mathématiques, le raisonnement est tout et non pas en économie politique.

En économie politique, c'est le sentiment (primant sur l'intérêt) qui est tout:

"On croit généralement, et ce fut là l'erreur des économistes qu'on nomme 'libéraux', que le raisonnement a une grande influence pour déterminer les actions sociales des hommes.

Rien n'est plus faux :

ce sont les sentiments et les intérêts qui déterminent principalement ces actions,

et pour certaines d'entre elles, les sentiments priment les intérêts."  

Telle était l'opinion de Vilfredo Pareto (1848-1923) sur la grande erreur de ses "amis" libéraux, qu'il avait écrite dans un article intitulé "Le raisonnement et l'évolution sociale", Journal de Genève, 16 mai 1903.

Dans un article antérieur intitulé "Psychologie du socialisme", Zeitschrift für Socialwissenschaft, III, 1900, p. 599-601, il avait insisté sur le point complémentaire suivant:

"On a beaucoup parlé de ce livre - Gustave Le Bon : Psychologie du socialisme, Paris, Félix Alcan, vii-496 pages - et il mérite d'être lu.

L'auteur est un adepte d'une certaine religion patriotique et anthropologique, il voit dans les socialistes, des concurrents et il les combat vivement.

Son idée fondamentale, c'est que :

'alors que les religions, fondées sur des chimères, ont marqué leur indestructible empreinte sur tous les éléments de civilisations et continuent à maintenir l'immense majorité des hommes sous leurs lois,

les systèmes philosophiques, bâtis sur des raisonnements, n'ont joué qu'un rôle insignifiant dans la vie des peuples et n'ont eu qu'une existence éphémère.

Ils ne proposent en effet aux foules que des arguments,

alors que l'âme humaine ne demande que des espérances.' (p. V).

[La seconde partie]

C'est la vérité, mais ce n'est qu'une partie de la vérité.

Pour qu'une impulsion donnée aboutisse à un résultat utile, il faut deux choses :

1º que les hommes cèdent à cette impulsion ;

2º qu'elle soit en harmonie avec les lois de la nature, qu'elle ne se heurte pas à des impossibilités objectives.

Portez votre attention sur une seule de ces conditions et vous aurez une théorie qui ne sera vraie qu'en partie.

Si vous ne considérez que la première condition, vous donnerez une part prépondérante, exclusive, au sentiment, car en effet seul le sentiment entraîne les hommes.

Si vous ne vous occupez que de la seconde condition, la science aura le premier rang, car en effet c'est la science seule qui nous fait connaître les lois de la nature.

Qu'ont à faire le sentiment, la religion, avec les découvertes de la boussole, de la navigation astronomique, des bateaux à vapeur, des chemins de fer, des télégraphes, des armes de guerre modernes, etc.

M. Le Bon voudrait-il soutenir que toutes ces découvertes n'ont pas

'marqué leur empreinte sur tous les éléments de la civilisation' ?

Pour entraîner des hommes au combat, il faut agir sur leurs sentiments, sur leur religion,

mais pour qu'ils gagnent la bataille, il ne faut pas les faire combattre avec des flèches contre des canons à tir rapide, ni les mettre sous les ordres d'un général qui ignore la stratégie et la tactique.

Le sentiment et la raison ont chacun leur part, et aucune de ces deux parts ne peut être négligée."

3. La non transposition supposée possible.

Relisons encore I. Ekeland :

… "Pour ma part, je chéris l'aphorisme de Sussman :

'En mathématiques, les noms sont arbitraires.

Libre à chacun d'appeler un opérateur auto-adjoint un 'éléphant', et une décomposition spectrale une 'trompe'.

On peut alors démontrer un théorême suivant lequel 'tout éléphant a une trompe'.

Mais on n'a pas le droit de laisser croire que ce résultat a quelque chose à voir avec de gros animaux gris". (Ekeland, 1984, p.123).

Autrement dit, en deçà des mathématiques, il y a des théories, mais au-delà, on ne sait pas et on ne saurait savoir.

A la différence des mathématiques, en économie politique, les noms ne sont pas arbitraires, ils désignent des gens, des réalités qui pensent et non pas des sujets à tel ou tel événement...

Comme y a insisté Murray Rothbard (The Logic of Action, 1997):

… "Le bien n'est pas défini par

- ses propriétés technologiques mais par

- son homogénéité aux exigences et aux souhaits des consommateurs".

"Good is not defined by

- its technological properties but by

- its homogeneity in relation to the demands and wishes of the consumers" (Rothbard, 1997, p. 302

Attention, en conséquence, à l'erreur habituel qui consiste à transposer directement un modèle mathématique de sciences physiques à l'économie politique.

Non seulement le raisonnement mathématique n'est pas tout, mais encore les mots y sont essentiels et le raisonnement mathématique n'y est plus rien.

4. Les sociologistes.

L'économie politique a une méthode aux mains des deux maux qui la persécutent, on vient de voir l'un, les mathématiciens, voyons le second, les sociologistes (voire les historiens).

A propos des sociologistes - devenus "sociologues" par la suite -, Poincaré n'hésitait pas à écrire :

… "Le Sociologiste est plus embarrassé ;

les éléments, qui pour lui sont les hommes, sont trop dissemblables, trop variables, trop capricieux, trop complexes eux-mêmes en un mot ;

aussi, l’histoire ne recommence pas ;

comment alors choisir le fait intéressant qui est celui qui recommence;

la méthode, c’est précisément le choix des faits, il faut donc se préoccuper d’abord d’imaginer une méthode, et on en a imaginé beaucoup, parce qu’aucune ne s’imposait ;

chaque thèse de sociologie propose une méthode nouvelle que d’ailleurs le nouveau docteur se garde bien d’appliquer, de sorte que la sociologie est la science qui possède le plus de méthodes et le moins de résultats." (Poincaré, Science et méthode, 1908)

Rien n'a changé depuis lors.

5. Les juristes.

Antérieurement, l'économie politique n'avait été qu'aux seules mains des juristes (XVIIIème siècle):

… "C'est en 1615 que l'Économie politique a reçu pour la première fois le nom sous lequel elle est aujourd'hui connue, dans un livre français, le Traicté de l'OEconomie Politique, par Antoine de Montchrétien." (Gide, Principes d’économie politique, 1931, p.15)

Le point de départ qui lui était donné, était double:

- d'un côté, les règles de droit et la législation, et leurs conséquences sur les actions des gens, et

- de l'autre, ce qui était dénommé "théorie de la valeur".

Et elle l'est restée, au moins en France, longtemps dans les universités (cf. ce texte de février 2016 ou celui-ci d'avril 2016).

6. Opposition des approches.

Il ressort des maux de la méthode de l'économie politique que les premiers ignorent les actions de vous et moi, les seconds mettent l'accent sur des comportements prétendus de populations imaginées et définies par leurs soins, i.e. sans réalité, où chacun de nous est mis de côté (lois d'offre et de demande).

Les premiers se vautrent dans l'inégalité et la redistribution obligatoire à l'initiative des hommes de l'état, les seconds jouent surtout avec des modèles de fiscalité et de dépenses publiques à la discrétion des mêmes.

Exemplaire des premières est le discours actuel, en France, des populistes sur le "revenu universel", notion imaginée par certains qui ne précisent pas, en particulier,"ce qui est parti "...

7. Conséquence.

Résultat de l'imbroglio,

- soit les mots ne sont pas définis (comme, par exemple, les mots "revenu", "parti", "croissance", etc.),

- soit l'économie politique se voit dotée de mots nouveaux essentiels, mis à la sauce française.

 

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Georges Lane enseigne l’économie à l’Université de Paris-Dauphine. Il a collaboré avec Jacques Rueff, est un membre du séminaire J. B. Say que dirige Pascal Salin, et figure parmi les très rares intellectuels libéraux authentiques en France. Publié avec l’aimable autorisation de Georges Lane. Tous droits réservés par l’auteur
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