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La libéralisation mondiale du commerce agricole, seule solution à la crise alimentaire

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Publié le 15 avril 2008
2106 mots - Temps de lecture : 5 - 8 minutes
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Rubrique : Editoriaux

 

 

 

 

L'augmentation spectaculaire des prix agricoles depuis le début du millénaire (140% depuis 2002, dont 75% depuis septembre 2006, selon la banque mondiale), et les émeutes de la faim qui en ont résulté dans un grand nombre de grandes agglomérations des pays émergents, de Yaoundé au Caire, amènent, comme cela était prévisible, leur lot de commentaires imbéciles généralement issus du prêt à penser anti-libéral et malthusien qui tient lieu à nombre de dirigeants et analystes de mauvais substitut à l’intelligence.

 

La chasse aux boucs émissaires va bon train

 

Tout d’abord, des sécheresses ayant affecté l’Australie et l’Ukraine permettent à certains d’incriminer incidemment le « réchauffement climatique » pour les désordres actuels. De tels arguments relèvent de la tromperie pure et simple. La production mondiale de Blé a augmenté de 3% et celle de Maïs de 10% en 2007 par rapport à 2006. Il y a chaque année, dans la multitude de bassins de production du monde, quelques uns où la récolte est moins bonne par la faute d’un aléa météorologique. Cela n’empêche pas que les rendements globaux soient en constante augmentation. Les prévisions pour 2008 font état d’une nouvelle hausse des productions de 6%. La production agricole augmente plus vite que la population mondiale depuis que le FAO tient ce genre de statistiques (années 60), et ce sans discontinuer.

 

Mais où est passé le marché libre ?

 

D’autre part, il est de bon ton d'accuser le « libre échange mondial » et « la spéculation avide sur les marchés agricoles » d'être à l'origine de ces tensions. Ah, « l’aveuglement du marché », n’est il pas le coupable idéal des maux que subissent les populations pauvres de ce monde ? N’est-il pas normal, dans ces conditions, de réclamer que les gouvernements du monde et

 

la sainte ONU

 

ne viennent réguler davantage ces marchés ?

 

Mais il n'est pas inutile de rappeler que ce sont principalement les interventions des états sur les marchés qui sont à l'origine des drames que nous vivons. Ces interventions sont très difficiles à dénombrer, mais leur omniprésence interdit de parler de « marché libre » concernant l'agriculture. Citons en quelques unes:

 

  • Tout d'abord, la mode des biocarburants, lourdement subventionnés au nom de chimères environnementales, a détourné au moins 7% des surfaces allouées aux cultures céréalières européennes (avec un objectif de 10% à terme) et 20% aux USA vers les biocarburants, sans parler des pays émergents. Ainsi, la production globale a augmenté, mais la part dédiée à l’alimentation de certaines productions a diminué, résultant dans une consommation mondiale légèrement supérieure à la production alimentaire, réduisant les stocks et suffisante pour provoquer une envolée des cours mondiaux. Même certains leaders d’opinion d’extrême gauche commencent enfin à reprendre à leur compte la dénonciation, depuis longtemps faite par les libéraux, de l’usage des sols pour nourrir les moteurs plutôt que les humains, parlant même de « crime contre l’humanité ».
  • Les masses considérables de subventions versées par les USA et l'Europe à leurs agriculteurs, ainsi que les barrières douanières à l'entrée de leurs marchés domestiques imposées par ces deux géants politiques, ont lourdement altéré les capacités des agricultures émergentes de s'adapter, car leurs productions doivent faire face à la compétition de produits subventionnés, donc vendus en dessous de leur prix de revient normal.
  •  Ces mêmes pays émergents ne sont pas dégagés de toute responsabilité: Ils imposent souvent à leur agriculture des réglementations, des quotas, des droits d'exploitation qui empêchent leurs agriculteurs de développer les produits qui leur permettraient d'accroître leur richesse.
  • Ce même reproche peut être fait à des pays riches comme la France, dont l'agriculture est soumise aux diktats d'organismes parasitaires tels que les SAFER, les directions départementales de l'agriculture, les chambres d'agriculture, etc... Essayez donc de vous établir agriculteur sans passer par les fourches caudines de ces bureaucraties para-agricoles: vous aurez les pires difficultés à pouvoir acheter des terrains, ou à obtenir l'autorisation de les exploiter. Certaines productions, soumises à des quotas, ont été de facto interdites d'expansion... Or les investissements agricoles sont longs à produire leurs effets: les rythmes de pousse et de croissance du bétail sont peu compressibles ! Les non-investissements induits par nos rigidités passées et actuelles se paient au prix très fort quelques années plus tard.
  • Les gouvernements de nombreux pays où se tiennent des émeutes sont non démocratiques, et ordinairement très dirigistes en matière économique.  Le pire exemple est sans doute aujourd'hui celui du Zimbabwe, autrefois exportateur agricole, aujourd'hui dans une situation critique parce que les fermiers blancs qui connaissaient le travail de fermier ont été chassés --- voire tués --- par les séides du pouvoir en place, qui se sont vus attribuer des terres dont ils étaient incapables d’extraire quelque production que ce soit, faute de compétence suffisante.
  • La France, rejointe par une partie de l'Europe, semble hélas faire des émules chez certains pays africains. Des associations écologistes extrémistes semblent être en mesure de convaincre plusieurs états pauvres, tels que la Zambie, de ne pas autoriser l'implantation de cultures OGM sur leur sol, voire de limiter le recours aux engrais les plus modernes. Pour Norman Borlaug, père de la première révolution verte, ceux qui agissent ainsi ne sont que « des utopistes des beaux quartiers qui viennent  dans le tiers monde pour y causer des ravages. »
  • Les barrières au commerce inter-africain sont souvent pires que celles imposées par l'Europe ou les USA au commerce avec l'Afrique. Lois douanières ineptes, douanes corrompues, infrastructures médiocre et peu sécurisées, empêchent la création de vastes aires de libre échange inter-africaines. Cette impossibilité d’échanger abondamment avec leurs voisins immédiats  interdit aux producteurs africains de se spécialiser là où ils peuvent être les meilleurs.
  • Toutes ces barrières au développement d'une agriculture plus performante et surtout capable de s'adapter à l'évolution de la demande mondiale n'ont rien à voir avec le commerce libre, avec un marché libre. 

 

Les spéculateurs, bourgeons de l’incurie étatique

 

Il est logique que des spéculateurs, aujourd'hui bouc-émissaires faciles de la presse mondiale, puissent prospérer sur un marché où les étranglements de l'offre sont aussi nombreux, provoquant une volatilité des prix importante à la moindre tension entre demande et offre. Mais les spéculateurs ne font jamais qu’investir leur argent là où les conditions économiques générales engendrent des signaux de variation importante des prix. Ils ne font que suivre les conséquences des distorsions opérées sur les marchés, quitte à les amplifier parfois, il est vrai, mais ils ne peuvent, sur des secteurs aussi atomisés, en être à l’origine. Dans des marchés véritablement libres, leurs marges d’action seraient bien plus faibles, car les adaptations naturelles des offreurs à leurs demandes seraient plus rapides et limiteraient en amplitude et en durée les goulots d’étranglement que nous observons aujourd’hui.

 

Il est difficile de dire quel est le volume de blé, de riz, de soja, ou de lait supplémentaire qui pourrait être produit aujourd'hui et demain si l'ensemble des barrières à l'adaptation des agriculteurs à leurs marchés étaient levées.  Gageons que le potentiel inexploité à cause de tous les interventionnismes publics mondiaux est d’ores et déjà très important.

 

Danger protectionniste

Malheureusement, les principaux dirigeants du monde prennent le chemin opposé à celui qu'ils devraient  prendre. Le congrès américain, de quel bord qu'il soit, s'est toujours opposé aux initiatives d’un G.W. Bush pour une fois bien inspiré, visant à  réduire les subventions aux fermiers du midwest. La France a toujours été, et restera, selon les propos de son actuel ministre de l'agriculture, à la pointe du combat pour « rénover » la politique agricole commune, c'est à dire, surtout, ne pas l'abolir, et maintenir un protectionnisme élevé. De nombreux  pays producteurs ont promulgué des lois pour empêcher l'exportation des productions agricoles de leurs paysans, leur barrant l’accès aux revenus permettant de moderniser leurs exploitations. 

 

Pire encore : les candidats démocrates à la présidence des USA, dont les chances d'élection sont réelles, sont tous les deux des protectionnistes acharnés. Quant à l’Europe, elle recherche des prétextes environnementaux, basés sur ces fichues émissions de CO2, pour instaurer un protectionnisme déguisé vis à vis de pays dont les installations productives ont un rendement plus faible que les nôtres. Voilà qui n’aidera sûrement pas les pays du tiers monde à améliorer leur situation économique.

 

La nocivité du concept « d’>auto-suffisance »

 

Les politiciens et experts des pays riches nous ressortent les vieilles antiennes selon lesquelles les pays émergents devraient rechercher l'auto-suffisance alimentaire. C’est une pure fumisterie. Cela a autant de sens que d'affirmer que l'Europe devrait viser l'autosuffisance pétrolière ou informatique ! Le Ghana importe les trois quarts du riz qu'il consomme, et pour cause, son territoire n'est pas très propice à l'implantation de rizières. Faudrait-il qu'il devienne auto-suffisant demain ? Ou faut il qu'il soit capable d'exporter ce qui lui permettra d'importer le riz dont les ghanéens ont besoin ?

 

C'est en produisant dans de bonnes conditions ce pour quoi ils sont les meilleurs puis en échangeant cette production sur les marchés les plus vastes qui soient, que les pays les plus modestes se sortiront de leur condition. Au lendemain de la guerre, des pays aujourd’hui aisés comme la Malaisie, Taiwan, la Corée, étaient aussi pauvres que le Mozambique ou

 

la Somalie. Aujourd'hui

 

, ces pays sont loin de l'autosuffisance alimentaire, mais leur capacité d'insertion dans le commerce mondial leur permet d'acheter ce qu'ils ne produisent pas à ceux qui savent le faire, et la hausse des prix alimentaires, si dramatique dans les pays pauvres, n'est pour eux qu'une difficulté mineure.

 

Utiliser les programmes de l'ONU, du FMI et autres institutions mondiales  pour promouvoir cette aberration que constitue le concept d’ « autosuffisance alimentaire » auprès des pays les plus pauvres revient à les pousser à rester dans un état de sous développement agricole incompatible avec les besoins croissants de leurs populations. En outre, cela conduira à y développer des mentalités peu enclines à favoriser leur ouverture au commerce mondial. Encore un crime contre l’humanité pauvre commise par des politiciens riches…

 

La libéralisation mondiale des échanges agricoles, seule solution durable à la crise alimentaire

 

La crise actuelle demande sans doute quelques réponses de court terme, telle qu’une aide numéraire permettant de solvabiliser provisoirement les populations les plus touchées par la hausse des prix, leur permettant de s’approvisionner dans la phase délicate que nous traversons. Encore faut il que cette aide puisse aboutir dans les portefeuilles de ceux qui en ont réellement besoin, sans au passage subir une ponction vers les comptes off shore de dirigeants corrompus. Plus facile à dire qu’à faire !

 

Mais ces mesures très immédiates ne resteront que de simples expédients qui ne résoudront en rien les problèmes structurels des marchés agricoles mondiaux si nous ne nous attaquons pas enfin aux effets pervers des interventions publiques qui  en diminuent l’efficacité.

 

Les négociations au sein de l’OMC en vue de libéraliser le commerce agricole doivent reprendre au plus vite, et les principaux blocs agricoles (Europe, USA, groupe de Cairns, BRIC) doivent s’entendre rapidement sur un agenda rapide d’abolition de toutes les barrières aux transactions internationales de matières agricoles : fin des subventions internes ou à l’exportation, levée des tarifs douaniers, fin de toute politique d’encouragement des biocarburants, abolition des barrières internes à l’établissement d’exploitations agricoles, campagnes d’information et fin des moratoires étatiques sur les cultures d’OGM ayant satisfait aux tests d’innocuité imposés par les principales législations sanitaires, et encouragement des pays émergeants à la création ou au renforcement d’espaces de libre échange intérieurs permettant d’améliorer la spécialisation et la compétitivité des agricultures émergeantes.

 

A ces conditions, le marché agricole retrouvera rapidement l’efficacité nécessaire pour permettre à la demande mondiale croissante de produits alimentaires de trouver face à elle une offre capable d’y répondre.

 

Vincent Bénard

Objectif Liberte.fr

Egalement par Vincent Bénard

 

Vincent Bénard, ingénieur et auteur, est Président de l’institut Hayek (Bruxelles, www.fahayek.org) et Senior Fellow de Turgot (Paris, www.turgot.org), deux thinks tanks francophones dédiés à la diffusion de la pensée libérale. Spécialiste d'aménagement du territoire, Il est l'auteur d'une analyse iconoclaste des politiques du logement en France, "Logement, crise publique, remèdes privés", ouvrage publié fin 2007 et qui conserve toute son acuité (amazon), où il montre que non seulement l'état déverse des milliards sur le logement en pure perte, mais que de mauvais choix publics sont directement à l'origine de la crise. Au pays de l'état tout puissant, il ose proposer des remèdes fondés sur les mécanismes de marché pour y remédier.

 

Il est l'auteur du blog "Objectif Liberté" www.objectifliberte.fr

 

Publications :

"Logement: crise publique, remèdes privés", dec 2007, Editions Romillat

Avec Pierre de la Coste : "Hyper-république, bâtir l'administration en réseau autour du citoyen", 2003, La doc française, avec Pierre de la Coste

 

 

Publié avec l’aimable autorisation de Vincent Bénard – Tous droits réservés par Vincent Bénard.

 

 

 

 

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Vincent Bénard, ingénieur et auteur, est Président de l’institut Hayek (Bruxelles, www.fahayek.org) et Senior Fellow de Turgot (Paris, www.turgot.org).
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