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Le nouveau mur de Berlin

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Publié le 26 février 2011
1601 mots - Temps de lecture : 4 - 6 minutes
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Rubrique : Editoriaux

 

 

 

 

Pas toujours facile de succéder à Paul, surtout un vendredi, lorsqu’il évoque pour faire rêver rien de moins qu’un monde sans argent et où la disparition ne serait pas une fatalité !

 

Surtout pour atterrir ensuite, quoique virtuellement, à Berlin et non pas au Caire, à Aden et à Sanaa, à Manama ou à Tunis et à Benghazi (en attendant d’autres pistes d’aéroports). En se rappelant, et j’en oublie, d’anciennes libérations vécues sur place et dans la fièvre, à Saigon (Hô Chi Minh ville), Santiago, Amman et Beyrouth, à Barcelone, Athènes ou Lisbonne et Lourenço Marques (Maputo), puis à Berlin (mais dans un autre contexte). En scrutant les nouvelles de Tripoli, où la famille régnante a la folie de proclamer vouloir mourir dans sa ville en la mettant à feu et à sang.

 

Comme on dit, cela remet les choses en perspective, et la litanie médiocre dont nous rendons compte devient moins insupportable, puisque dans certaines circonstances – généralement, elles sont imprévues – des bouchons qui semblaient à jamais scellés sautent ! Champagne !

 

Sans attendre le dessert, ils s’y sont mis à 189 pour mettre les pieds dans le plat ! C’est le nombre d’économistes allemands signataires d’un court manifeste publié par le Frankfurter Allgemeine Zeitung, le quotidien étendard des conservateurs allemands, qui balaye d’un revers tous les bricolages de stabilisation financière actuels, à propos desquels les discussions n’en finissent pas ; rendant de plus en plus incertain un accord européen d’ici au sommet européen de la fin mars.

 

L’idée centrale défendue est de favoriser à toute autre solution une restructuration de la dette souveraine des Etats en difficulté et de confier au FMI la responsabilité d’en décider. C’est seulement dans ce contexte que des crédits pourraient être consentis, et pas avant. Les signataires préconisent en conséquence la mise au point d’un mécanisme de mise en faillite des Etats surendettés. Corrélativement, la BCE ne devrait pas selon eux continuer à effectuer sans limite des achats obligataires sur le marché secondaire.

 

Cette prise de position intervient dans un climat politique complexe, marqué dernièrement par l’annonce d’un projet des groupes parlementaires de la coalition gouvernementale, qui vise à restreindre par un vote du Bundestag les marges de manœuvres d’Angela Merkel, une véritable fronde à l’égard du flou de sa politique, après les coups de semonce de la Bundesbank. Sont en particulier visés toute décision de sa part permettant au fonds de stabilité européen d’acheter des obligations souveraines ou de financer le rachat des leurs par des Etats émetteurs. « La responsabilité des uns envers les autres ne doit pas être élargie », dit le projet, on ne peut plus clairement.

 

Les 189 économistes considèrent dans leur texte commun que la garantie permanente de pouvoir disposer de crédits serait une « incitation massive » a répéter les erreurs du passé, c’est à dire à ne pas respecter les critères de dette et déficit public de la zone euro. Ils estiment également que les mesures envisagées pour le pacte de compétitivité qui devrait accompagner les mesures de stabilisation financière en cours d’élaboration seraient trop faibles pour s’y opposer.

 

Il y a plusieurs manières d’analyser ce qui semble préfigurer un tournant européen, s’il se révélait impossible de passer outre un blocage allemand en bonne et due forme, qui sonnerait le glas de toute tentative de rapiécer un projet initial de sortie de crise déjà sérieusement mité.

 

La plus immédiate est d’enregistrer un repli des Allemands sur ce qu’ils considèrent être la meilleure défense de leurs intérêts, tournant résolument le dos à toute expression d’une solidarité européenne. Prenant le risque renforcé d’un éclatement de la zone euro, aux conséquences moins prévisibles qu’il n’y paraît.

 

Fort de ses résultats économiques, l’Allemagne peut être tentée de croire qu’elle s’en sortira mieux toute seule. Alors qu’une contestation sociale importante monte, les travailleurs allemands réclamant leur part de cette nouvelle prospérité, mettant en avant la fragilité et le renforcement de la nature précaire de l’emploi que dissimule sa remontée.

 

Berthold Huber, président du syndicat de l’industrie IG Metall a déclaré hier « Nous voulons envoyer un signal aux employeurs et responsables politiques : il faut arrêter cette course au dumping au détriment de l’humain ». Il a ainsi donné le sens de la journée d’action, hier jeudi, où plus de 200.000 travailleurs ont manifesté : « En cette période de croissance, nous nous élevons contre la dégradation des conditions de travail en raison du recours massif au travail intérimaire et aux emplois précaires ».

 

L’année 2011 va encore être marquée par six élections régionales successives, après que le CDS a enregistré une vertigineuse défaite à Hambourg, un ancien fief de longue date social-démocrate. La coalition toute entière semble tentée de poursuivre sur la voie engagée par le FDP – les libéraux anciennement pro-européens – qui consiste à faire du refus de toute implication allemande dans la stabilisation financière européenne un levier électoral.

 

Des campagnes incessantes menées par la presse à sensation, comme Bild, relayent auprès de l’opinion publique allemande la sourde opposition à celle-ci que les milieux conservateurs entretiennent et développent.

 

Une autre analyse, complémentaire, peut être proposée. N’est-il pas déjà acquis que les bricolages européens en cours – ainsi que ceux qui sont laborieusement discutés – ne sont pas à la hauteur des problèmes qu’ils prétendent régler ? Que la dette publique, énormément gonflée par la crise financière et le sauvetage des banques comme viennent de le montrer les derniers chiffres allemands, est devenue trop importante pour pouvoir être digérée par une politique d’austérité budgétaire renforcée accompagnée de soutiens financiers européens chers monnayés ?

 

Destatis, l’office fédéral allemand des statistiques, vient de rendre public le chiffre de la dette allemande (Etat fédéral, Länder et communes), qui a atteint 1.999 milliards d’euros, soit une augmentation de 18%, ou 300 milliards d’euros en un an. C’est la création de bad banks qui est pour l’essentiel à l’origine de celle-ci, notamment pour Hypo Real Estate (HRE) et la banque régionale publique WestLB. Qu’en sera-t-il demain de la dette, lorsqu’il ne pourra plus être évité de poursuivre les restructurations des banques régionales allemandes, dont celle de WestLB n’était que la première étape ?

 

Les 189 économistes allemands, quelles que soient leurs motivations, ne font que sanctionner cette évidence. Ils en viennent à une conclusion qui a été soigneusement rejetée jusqu’à maintenant : il faut restructurer, c’est à dire négocier le montant et le calendrier de remboursement de la dette souveraine des pays qui ne peuvent faire face à son remboursement.

 

Cela revient à ouvrir une boîte de Pandore et à projeter sur le devant de la scène ce qui était relégué dans les coulisses : l’état du système bancaire européen. Ainsi qu’à reconnaître la véritable dimension de la crise européenne actuelle, ce que les économistes allemands se gardent de faire, ne voulant implicitement s’en tenir qu’aux différences de compétitivité entre pays.

 

La consanguinité d’une situation où l’on a vu les banques européennes financer une dette européenne dont l’accroissement brutal résultait de la crise financière elle-même est une donnée essentielle. Tant qu’elle ne sera pas prise en compte, la crise proprement européenne perdurera.

 

En attendant, la BCE qui souhaitait se désengager de ses mesures non conventionnelles se retrouve bloquée, ce qui n’est pas un moindre paradoxe de la position allemande, qui a toujours fait de l’orthodoxie de la politique de celle-ci la pierre cardinale de sa vision européenne. Le marché joue quant à lui la hausse prochaine de son taux, destinée à faire face à la menace d’une remontée de l’inflation en Allemagne, mais qui va accroître les difficultés des pays de la zone des tempêtes. Toute la limite des politiques monétaristes trouve ainsi son illustration la plus exemplaire.

 

La prise de position des 189 économistes allemands est ambivalente. Politiquement, elle va conforter le mouvement de repli des Allemands et rendre encore plus aléatoires, si ce n’est impossible, les tentatives de montage d’un filet de sécurité financier européen. Economiquement, elle met le doigt là où cela fait mal et renforce les divisions déjà enregistrées en Allemagne entre les milieux financiers et industriels. Ces derniers toujours déterminés à ce que les banques prennent leurs responsabilités, qu’elles ont largement éludées.

 

C’est ce qui permet de comprendre les mesures déjà prises par le gouvernement allemand en matière de taxation des banques, ainsi que son soutien maintenu à un projet de taxation des transactions financières, qui ne se résument pas comme en France à de simples opérations politiques de relations publiques sans lendemain. Totalement pris de cours par les opérations hasardeuses et catastrophiques de son système bancaire, le gouvernement allemand a ainsi manifesté, avec calcul mais non sans quelque naïveté, son refus d’être surpris une seconde fois.

 

Le fait qu’aucune piste ne soit suggérée en terme de mécanisme de mise en faillite par les économistes pétitionnaires et en particulier que ne soit même pas évoquées les conséquences qui en résulteraient pour le système bancaire, montre toutefois qu’il y a encore du chemin à faire !

 

En reconstruisant un mur destiné à ne plus les diviser, mais à les isoler au prétexte de les protéger, les Allemands sont en train d’ajouter une lourde pierre à un édifice européen qui déjà chancelait sous le poids de ses propres contradictions.

 

 Billet rédigé par François Leclerc

 

Paul Jorion

 

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.   

 

 

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