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L'Union
européenne fonctionne plus que jamais sur le modèle de la
supercherie.
Depuis que les principes qu'ont défendus les politiques pour faire
adopter le traité
dit de Maastricht par les électeurs ont été
abandonnés par iceux-là progressivement, il faut se rendre
à l'évidence.
Fini les critères de convergence prétendument scientifiques
dont ils avaient plein la bouche dans la décennie 1990 pour que les
électeurs votassent "oui" au referendum sur le traité
de Maastricht qu'ils soumettaient ; fini le "pacte de
stabilité" dont ils se flattaient d'avoir trouvé
l'idée pour que les budgets nationaux ne s'éloignent pas de
l'équilibre budgétaire quoi qu'il arrive ; et fini l'objectif
d'équilibre national des finances publiques (par exemple en France).
Comme il fallait s'y attendre, tout cela a fait long feu étant
données les qualités des personnages et l'imposture des
idées.
Mais, faisant feu de tout bois, les mêmes continuent à
pérorer.
Voici un morceau d'anthologie que j'ai obtenu sur le site europa
:
"La crise met en lumière le besoin urgent de
coordination et de surveillance macroéconomiques plus larges et plus
profondes dans la zone euro.
L'euro a joué un rôle précieux de bouclier face aux ondes
de choc liées à la crise économique et financière
la plus grave depuis la guerre.
Mais la crise montre également combien il est important pour tous de
corriger sans tarder les différences de compétitivité.
Dans ce sens, la déclaration annuelle 2009 sur la zone euro
préconise d'opérer un ajustement interne efficace qui place la
zone euro sur une trajectoire de croissance soutenue et
équilibrée et restaure la viabilité de ses finances
publiques à long terme.
«L'euro a joué un rôle précieux de bouclier durant
la crise, même pour les pays non membres.
Toutefois, il ne peut à lui seul corriger les
déséquilibres internes et externes. La zone euro et l'Eurogroupe
doivent redoubler d'efforts et considérer les politiques
économiques et budgétaires comme des matières
présentant un intérêt commun, et s'attaquer aux
divergences sur le plan de la compétitivité»,
a déclaré
Joaquín Almunia, le commissaire responsable des affaires
économiques et monétaires, avant d'ajouter:
«Avec la mise en place d'un nouveau cadre pour la croissance,
décidée par les responsables du G20
à Pittsburgh, il est désormais primordial pour la zone euro
de s'exprimer efficacement d'une seule voix afin de défendre
correctement ses intérêts au niveau mondial.»
Les politiques en question continuent d'autant plus à pérorer
que le processus à quoi ont donné lieu à la fois le
traité de Maastricht et leurs attitudes se parsèment
d'impostures qu'ils déclenchent et dont ils tirent parti, en
dépit de tout, ces derniers temps.
La dernière semaine leur a été
bénéfique. Il faut être en alerte.
1. La Pologne.
Le 9 octobre 2009, Lech Kaczynski, président de Pologne, a
signé le traité de l'Union européenne dit "de
Lisbonne", laissant à la République tchèque le
rôle d'être le seul obstacle à la proposition de
requalifier les règles de l'Union européenne (U.E.).
La Pologne est devenue le 26eme pays de l'U.E. à ratifier le
traité qui, aux dires de ses partisans, permettra de rationaliser la
prise de décision et de créer une présidence permanente
dans le but d'accroître l'influence de l'Union dans les affaires
mondiales.
"Aujourd'hui est un jour très particulier,"a
déclaré Lech Kaczynski lors de la cérémonie de
signature à Varsovie.
"La forme du document final est un succès pour la Pologne.
Le traité va ouvrir la voie à un nouvel élargissement de
l'U.E.", a ajouté le président polonais.
"'Le bloc' ne peut pas dire 'non' aux aspirations des Géorgiens
et des Ukrainiens à le rejoindre", a-t-il précisé.
2. L'Union
européenne au XXIe siècle.
Il convient de rappeler que les chefs d'État et de gouvernement des
vingt sept États membres de l'Union européenne ont signé
un traité à Lisbonne, le 13 décembre 2007, après maintes
péripéties .
Le traité dit "de
Lisbonne" modifie les traités de la Communauté
européenne puis de l'Union européenne convenus (depuis le
traité dit de Rome en 1957), mais il ne les remplace pas.
Il dote l'"Union européenne" – qui a
succédé en dénomination à la
"Communauté européenne" - d'un autre cadre juridique
et de moyens.
Selon certains, ces moyens sont nécessaires pour faire face aux enjeux
futurs. Seulement, ces enjeux ne sont guère précisés :
qui d'ailleurs serait assez omniscient pour les préciser. .
Ces moyens sont aussi jugés nécessaires pour répondre
aux attentes des citoyens.
Seulement là encore, ceux-ci n'ont jamais été
consultés sur ce point jusqu'à présent de quelque
façon que ce soit. Les attentes ne sont donc, en grande partie, que
des produits de l'imagination des politiques ou bureaucrates.
Certes, des Européens comptent sur l'Union ainsi traitée pour
répondre aux questions qu'ils se posent concernant, notamment, la
mondialisation, les changements climatiques et démographiques, la
sécurité ou l'énergie.
Selon eux, l'application du traité va renforcer la démocratie
dans l'Union européenne – comme si celle-là était
attaquée –. Mais si tel est le cas, le traité n'indique
pas qui attaque. Vu le degré de détail dans lequel il entre
tout au long de son développement, il devrait donner l'indication.
L'application du traité va aussi renforcer la capacité de
l'Union européenne à défendre jour après jour les
intérêts de ses citoyens. Mais là encore, le
traité ne précise pas qui les attaque, on ne sait.
Le traité doit permettre à l'Union européenne de
disposer d'institutions et de méthodes de travail efficaces.
Il dispose ainsi en sorte que le Parlement européen et les parlements
nationaux voient leurs rôles respectifs renforcés.
Certains en déduisent que les citoyens pourront plus facilement faire
entendre leur voix. C'est un vœu pieux.
Autre éclairage proposé, il sera plus aisé de savoir qui
fait quoi aux niveaux européen et nationaux. On peut toujours le dire.
2.A. Parlements
européen et nationaux.
Une chose est certaine, le Parlement européen aura un rôle
renforcé pour le meilleur et pour le pire.
Directement élu par les citoyens de l'UE comme c'est
déjà le cas, il acquerra des compétences dans le domaine
de la législation, du budget et des accords internationaux.
En particulier, avec le recours accru à la procédure de
codécision, il sera sur un pied d'égalité avec le
Conseil des Chefs d'Etat et de gouvernement qui représente les
États membres pour la majeure partie des actes législatifs
européens.
Comme pour ne pas effaroucher les citoyens, des commentateurs, voire les
politiques eux-mêmes, font valoir une participation accrue des
parlements nationaux qui pourront participer davantage aux travaux de l'Union.
2.B. Relations entre les
Etats membres et l'Union européenne.
Ils affirment que, pour leur part, les relations entre les États
membres et l'Union européenne vont gagner en clarté grâce
à une classification précise des compétences.
A sa lecture, le traité renforce la capacité d'action de l'U.E.
dans plusieurs domaines tels que la liberté, la sécurité
et la justice, la lutte contre le terrorisme et la criminalité.
Il traite également, dans une certaine mesure, d'autres domaines comme
la politique énergétique, la santé publique, la
protection civile, le changement climatique, les services
d'intérêt général, la recherche, l'espace, la
cohésion territoriale, la politique commerciale, l'aide humanitaire,
le sport, le tourisme et la coopération administrative.
Soit dit en passant, grâce au droit d'initiative populaire, un million
de citoyens originaires de différents États membres pourront
toujours demander à la Commission de présenter de nouvelles
propositions.
En conséquence du traité, l'U.E. sera dotée de
méthodes de travail et de règles de vote dites
"simplifiées" et d'institutions permettant le fonctionnement
d'une Union à vingt sept.
Le vote à la majorité
qualifiée au sein du Conseil des chefs d'Etat et de
gouvernement sera étendu à de nouveaux domaines politiques soit
disant afin d'accroître l'efficacité et la rapidité de la
prise de décisions.
À compter de 2014, le calcul de la "majorité
qualifiée" se fondera sur le principe de la double
majorité – des États et de la population –
reflétant ainsi la double légitimité
qui caractérise l'Union.
La double majorité sera atteinte avec le vote favorable d'au moins 55
% d'États membres réunissant au moins 65 % de la population de
l'Union.
Le traité introduit aussi un lien direct entre l'élection du
président de la Commission et les résultats des
élections européennes.
Il contient de nouvelles dispositions pour la composition future du Parlement
européen et pour une Commission réduite.
A l'occasion, il précise les règles concernant la
coopération renforcée et les dispositions financières.
Le "haut représentant de l'Union pour les affaires
étrangères et la politique de sécurité" qui
sera nommé... s'appuiera sur un nouveau service européen pour
l’action extérieure.
Il sera également vice-président de la Commission.
Mais quelles seront ses relations avec le président du Conseil
européen, i.e. du conseil des chefs d'Etat et de gouvernement ?
2.C. L'Etat
européen potentiel.
Le traité prévoit en effet la création d'un poste de
président du Conseil des chefs d'Etat et de gouvernement.
Il sera élu pour un mandat de deux ans et demi avec la
possibilité d'être réélu une fois sans
précision outre mesure de ses compétences… une grande
partie du pouvoir de la fonction n'a pas encore été
défini.
Cela remplacera la présidence tournante semestrielle des Etats membres
pratiquée actuellement mais qui ne disparaîtra pour autant !
Pour des commentateurs étrangers, la présidence est l'une des
deux clefs de voûte du traité de Lisbonne.
L'autre tient dans les alinéas du traité selon quoi l'Union
européenne sera dotée d'une personnalité juridique
unique. Elle deviendra ainsi, sur la scène internationale, comparable
aux "pays tiers" et aux organisations internationales
créées de fait au XXème siècle.
En d'autres termes, sera né l"Etat européen
potentiel" sans coup férir.
3. Exemptions,
dispenses, etc.
Toujours
selon des commentateurs, la signature polonaise augmente la pression sur Vaclav
Klaus, président de la république tchèque
(photographie ci-contre), pour qu'il renonce à son opposition au
traité que doivent ratifier tous les gouvernements de l'U.E. sans
exception pour qu'il entre en application.
Alors que le parlement tchèque a approuvé le traité, Vaclav
Klaus a jusqu'à présent refusé de le signer, signature
exigée par la législation tchèque.
Ses alliés au Sénat ont même contribué à
retarder le temps de la signature en déposant le 29 septembre un
recours devant la Cour constitutionnelle pour bloquer le traité.
"La cour tchèque peut, bien évidemment, rendre son
jugement à temps pour que les dirigeants de l'U.E. commencent à
débattre sur les nominations de haut niveau, au sommet des 29-30
octobre prochains à Bruxelles", a déclaré, la
semaine dernière, Fredrik Reinfeldt, Premier ministre suédois,
dont le pays assure la présidence tournante de l'U.E. pour le second
semestre 2009.
Infatigable, Vaclav Klaus a trouvé une nouvelle faille dans la
construction juridique dénommée "traité", ce
qui l'a amené à déclarer que la ratification
était hors de question jusqu'à ce que le gouvernement
tchèque obtienne une dispense en relation avec la déclaration des droits
annexée au traité.
Déjà, la Pologne et la Grande-Bretagne ont obtenu des dispenses
quand le traité a été négocié en 2007.
La République tchèque a besoin d'une exemption semblable pour
éviter un déluge de réclamations de
propriétés de la part des 3,5 millions d'Allemands de souche
qui ont été expulsés de son territoire après la
Deuxième Guerre mondiale, a déclaré Vaclav Klaus.
4. L'Irlande.
Le fait est que le président tchèque a intensifié son
combat contre le traité une semaine après que les
électeurs d'Irlande ont donné, en majorité, leur accord
au nouveau système de décisions politiques que contient le
traité.
A l'issue du second référendum qui leur a été
soumis le 2 octobre 2009 après qu'ils eurent répondu
"non" majoritairement au premier,
il s'avère en effet que la majorité des Irlandais a voté
en faveur du texte, renversant ainsi le vote "non" de
l'année précédente.
Mais entre temps, les Irlandais avaient obtenu des garanties, comme les
Anglais et les Polonais.
L'Irlande a en effet reçu des garanties, juridiquement contraignantes,
l'assurant que le traité ne portera pas atteinte à sa
neutralité militaire ni à sa souveraineté en
matière fiscale ou à son droit de formuler sa propre politique
sur des questions éthiques comme l'avortement.
Ces craintes étaient tenues "responsables" du vote
"non" au premier référendum.
L'Irlande avait fait de ces garanties la condition préalable à
la tenue d'un second référendum.
Il reste à McAleese, président de l'Irlande en exercice,
à signer le traité pour achever le processus de ratification.
5. La campagne
présidentielle ouverte en sous-mains.
Selon certains commentateurs, la ratification par la Pologne a ouvert la
phase finale des huit années d'efforts pour réformer
l'U.E. Elle a donné le départ en coulisse à la
campagne présidentielle.
À l'heure actuelle, tous les États membres ont approuvé
le traité et vingt cinq d'entre eux sont arrivés au terme du
processus de ratification.
L'opposition à Tony Blair, 56 ans, ancien Premier ministre
britannique, le candidat de profil de plus haut niveau pour le poste de
président de l'Union, s'est étoffée la semaine
dernière
Pour ses détracteurs, le dirigeant du Royaume-Uni de 1997 à
2007 ne correspond pas au poste parce que son pays est resté hors de
l'UE,
- par son refus de renoncer à la livre, de la fusionner dans l'euro
et
- par les exemptions qui lui ont été accordées comme par
exemple l'exemption aux "accords de Schengen" (zone de libre
circulation sans passeport entre les pays) .
Le Luxembourg, deuxième plus petit état de l'U.E., cherche
à rallier l'opposition à Blair, en soulignant son soutien
à
- la guerre en Irak et
- la tentative de 2005 de couper le budget de l'Union européenne pour
l'aide au développement de l'Europe de l'est.
"Blair a plus souvent divisé qu'uni", a même
déclaré Jean Asselborn, ministre luxembourgeois des Affaires
étrangères, à la Sueddeutsche
Zeitung, dans une interview publiée le 8 octobre.
Il faut savoir qu'il est traditionnel que les vingt sept dirigeants de l'U.E.
prennent les décisions majeures, comme les nominations à des
postes de premier plan, par consensus.
Les règles exigent sinon une «majorité
qualifiée», les plus grands pays ayant le plus à dire.
Il y a d'autres candidats à la présidence cités dans la
presse européenne comme
Jean-Claude Juncker , Premier ministre luxembourgeois,
Jan Peter Balkenende, Premier ministre néerlandais et
Wolfgang Schuessel, ancien chancelier autrichien.
Matti Vanhanen, Premier ministre finlandais, a proposé pour sa part le
nom de son prédécesseur, Paavo Lipponen.
Blair et Lipponen "sont tous les deux de très bons noms, et il
pourrait y avoir d'autres noms, a-t-il déclaré dans une
interview à Helsinki.
Bref, des conflits en perspective et les coûts y afférant, de
nouveaux gaspillages qu'il faudra payer et dont personne ne parlera à
moins que… en conséquence des impostures.
Georges Lane
Principes de science économique
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Georges
Lane enseigne l’économie à
l’Université de Paris-Dauphine. Il a collaboré avec
Jacques Rueff, est un membre du séminaire J. B. Say que
dirige Pascal Salin, et figure parmi les très rares intellectuels
libéraux authentiques en France.
Publié avec
l’aimable autorisation de Georges Lane. Tous droits
réservés par l’auteur
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