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Deutsche Bank montre la voie, Par Bruno Bertez
On l’attendait depuis longtemps. La Deutsche Bank fait une mini-opération
vérité. Est ce le prélude à un changement de politique de la Banque d’une
part et de l’Allemagne d ‘autre part? Cette opération pourrait bien en
déclencher d’autres dans le secteur.
La première banque allemande va déprécier la totalité des
survaleurs (« goodwill ») et certains actifs incorporels attachés à
sa banque de financement (CB&S) et à sa division clientèle privée et
professionnelle (PBC). Au total, une facture comptable de 5,8 milliards
d’euros, essentiellement due à la prise en compte de règles prudentielles
plus strictes et de la cession de Postbank. Elle va également prendre une
dépréciation de 600 millions d’euros sur sa part de 20% dans Hua Xia Bank,
qui n’est plus considérée comme stratégique, et une provision de 1,2 MdE pour
litiges, dont la majorité ne devrait pas être fiscalement déductible.
Ainsi ce sont 7,6 MdsE d’exceptionnels qui viendront grever
les comptes trimestriels. Ils seront déficitaires de l’ordre de 6 MdsE
avant impôts et de 6,2 MdsE après. (lire
la Suite).
Article de Zero Hedge, publié le 7 octobre 2015 :
« Tandis que les rumeurs vont bon train concernant
l’exposition de Deutsche Bank (DB) au fiasco Volkswagen, même si aucune
preuve n’a été avancé jusqu’à présent, DB vient juste de publier cet
préannonce :
- Deutsche Bank anticipe une perte de 6,2
milliards d’euros au T3
- Deutsche Bank recommande une diminution du
dividende ou son éventuelle annulation
En cause, une très lourde perte de 6,2 milliards d’euros
attendue au troisième trimestre, liée à de fortes dépréciations – 5,8
milliards – dans sa banque d’affaires et de détail, sur fond de durcissement
à venir de la règlementation sur le capital et de la cession de sa filiale de
détail Postbank, destinée à une introduction en Bourse.
Le groupe va également passer une nouvelle provision de 1,2
milliard d’euros pour faire face aux quelque 6.000 litiges juridiques dans
lesquels son nom est cité, du scandale de manipulation des taux
interbancaires du Libor aux soupçons de manipulation du marché des métaux
précieux, en passant par de possibles actes de blanchiment d’argent en
Russie.
En Inde, le maintien de 17 succursales de détails est en
question, rapporte la presse allemande.
Il pourrait aussi se séparer à terme de sa participation
d’environ 20% dans la banque chinoise Hua Xia Bank. Le groupe a annoncé
mercredi soir avoir passé une autre dépréciation de 600 millions d’euros sur
cette part et considère désormais cet investissement comme étant
« non-stratégique ».
La nouvelle publiée, l’action de Deutsche Bank
s’est effondrée de 6 %. »
La banque allemande est régulièrement citée parmi les entités financières
susceptibles de devenir le « prochain Lehman », même si Glencore
est venu récemment grossir ces rangs. Le 12 juin 2015, nous publiions déjà un
excellent article de NotQuant.com
sur le risque Deutsche Bank , que nous reproduisons ci-dessous à
l’instar de ce qu’a fait Zero Hedge :
« Avec le recul, l’effondrement de Lehman
Brothers en 2008 s’est déroulé à une vitesse surprenante. À la surface,
quelques signes annonciateurs se déclarèrent mais la réelle étendue du
désastre n’a fini par apparaître que dans les derniers instants, lorsqu’il
était devenu évident que Lehman était condamné.
Afin de dresser le parallèle avec la Deutsche Bank,
récapitulons les événements de 2007 et 2008 :
Malgré le peu d’indicateurs concernant le destin de Lehman, les
initiés furent par contre au courant assez tôt : à la fin 2008 Goldman Sachs
paria en son nom des montants énormes contre Lehman, une position qui fut
appelée en interne « le gros short » (Big Short), un pari qui allait
rapporter gros durant la crise.
À l’été 2007, les crédits subprimes commençaient à battre de
l’aile sur les marchés. À partir du mois d’août, la liquidité commença à
s’évaporer rapidement tandis que les fonds derrière les titres adossés à des
créances s’asséchaient. Malgré tout, même jusqu’à la fin 2007, peu de gens
suspectaient ce qui allait arriver à Lehman.
La première indication publique date probablement du 9 juin
2008, lorsque Fitch abaissa la note de Lehman à AA- avec perspective négative
et ironie du sort à la même date jour pour jour ce fut l’abaissement de la
note de Deutsche Bank par Standard & Poor’s en 2015, 7 ans plus tard. La
« perspective négative » indique qu’une nouvelle baisse de la note est probable.
Dans le cas de Lehman, ce fut un euphémisme.
À peine 3 mois plus tard dans le courant d’une seule semaine,
Lehman annonçait une énorme perte de 3,9 milliards et déclarait faillite
(entre le 10 et le 15 septembre). Le reste, vous le connaissez. (…)
Chronologie des difficultés de la Deutsche Bank
Voyons maintenant ce qu’il s’est passé avec la Deutsche Bank
durant les 15 derniers mois :
- En avril 2014, Deutsche Bank est forcée de lever
du capital de tiers 1 pour 1,5 milliard afin de renforcer son bilan.
Pourquoi ?
- Un mois plus tard, en mai 2014, la recherche
effrénée de liquidités continue alors que la DB annonce la vente
d’actions pour 8 milliards de dollars, bradées de 30 %. De nouveau,
pourquoi ? La nouvelle étonna les médias financiers. L’image de géant
tranquille de la Deutsche Bank était écornée par ses efforts pressés
pour trouver de l’argent frais. Quelque chose devait se tramer en
coulisse.
- Mars 2015, la Deutsche Bank ne passe pas les
stress tests, on lui demande de renfoncer sur-le-champ sa structure en
capital.
- En avril, la Deutsche Bank confirme son accord
de règlement à l’amiable avec les États-Unis et le Royaume-Uni
concernant la manipulation du LIBOR. La banque se retrouve avec une
amende énorme de 2,1 milliards à payer à la justice américaine.
- En mai, l’un des CEO de Deutsche Bank, Anshu
Jain, reçoit de la part du Directoire de la banque des pouvoirs étendus
ce qui ressemble furieusement à une décision de résolution de crise, le
pouvoir exécutif étant souvent renforcé durant les périodes difficiles.
- Le 5 juin 2015, la Grèce ne rembourse pas le
FMI. Le risque du défaut du pays sur sa dette est désormais élevé ce qui
aurait d’énormes implications pour la DB.
- Week-end du 6 et 7 juin : les 2 CEO de Deutsche
Bank annoncent à la surprise générale leur départ. Soit un mois
seulement après que l’un d’entre eux ait reçu des « pouvoirs spéciaux ».
Anshu Jain sera le premier à partir à la fin de ce mois de juin tandis
que Jürgen Fitschen suivra en mai prochain.
- 9 juin 2015 : Standard & Poor’s abaisse la note
de Deutsche Bank à BBB+ soit seulement 3 crans au-dessus de « junk »
(actif pourri). Soit une note inférieure à celle accordée par Fitch à
Lehman il y a 7 ans alors que la banque avait mordu la poussière à
l’époque dans les 3 mois.
Voici ce que nous savons. Quelle est la gravité de la situation ?
Nous l’ignorons car nous n’avons pas le droit de savoir. Mais ces nouvelles
n’émanent pas d’une société saine.
Quelle est l’exposition de la Deutsche Bank ?
Le problème de la Deutsche Bank, c’est que son secteur bancaire
conventionnel (agences) ne génère pas de bénéfice significatif. Pour
conserver ses marges, elle a dû prendre plus de risques que ses pairs.
Deutsche Bank repose sur 75 trillions de dollars de paris sur les
produits dérivés ce qui représente 20 fois le PIB allemand. La DB fait même
mieux de 5 trillions que la JP Morgan.
Avec une telle exposition, des mouvements relativement limités
peuvent engendrer des pertes catastrophiques. La Grèce est au bord du défaut,
l’annonce de faillites n’est pas de l’ordre de l’impossible. (…) L’histoire
ne se répète pas mais elle rime et sur les marchés, cela a tendance à se
passer tous les 7 ans. »
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