En France, cela faisait près de vingt ans qu’on n’avait pas parlé
d’exploitation aurifère. Et pourtant, le Ministre du redressement productif,
Arnaud Montebourg, a annoncé un investissement massif pour garantir
l’approvisionnement en métaux rares, et la création d’une Compagnie nationale
minière française.
Cette annonce fait suite à deux permis de recherches accordés pour une
zone entre la Sarthe et la Mayenne et en Maine-et-Loire. Faut-il y voir le
signe d’une ruée vers l’or française ? Ou un regain d’intérêt pour un
métal précieux, quite à en chercher des infimes quantités ? Le point sur l’or
en France.
L’or en France : un peu d’histoire
La France a aussi connu ses exploitations de mines d’or. De l’orpaillage
au néolithique et à l’antiquité, mais surtout un intérêt plus marqué pour une
extraction aurifère plus organisée, à partir du XVIIIe siècle : la première
tentative d’exploitation, en Isère, fut stoppée en 1788 à cause de la faible
teneur du filon. En 1903, la Mayenne était le berceau d’un regain d’activité
aurifère non loin de Laval, stimulée par la mise au point du traitement des
minéraux d’or par le cyanure.
L’activité aurifère française s’est ensuite concentrée dans l’Aude, dans
la Creuse, dans la Sarthe et dans la Haute-Vienne. Et c’est d’ailleurs en
Haute-Vienne que les dernières activités aurifères déjà moribondes cessent en
octobre 2001, à la mine du Bourneix.
Une Compagnie nationale des mines de France pour trouver de l’or,
et pas seulement
En un an, le ministère du redressement productif a pourtant accordé deux
permis de recherches, longtemps après les dernières activités d’extraction.
Le premier a été accordé l’année dernière à la société Variscan Mines, pour
une zone de plus de 200km2 à cheval sur les départements de la Sarthe et la
Mayenne. La même société vient de décrocher un deuxième permis de recherche
d’or et d’argent, cette fois dans le Maine-et-Loire, dans une zone près de
Cholet déjà largement exploitée au siècle dernier. « Le permis attribué à
la société Variscan Mines, également détentrice d’un permis dans la Sarthe,
lui permettra d’entreprendre, dans le périmètre d’exploration déterminé, des
démarches de reconnaissance et d’acquisition de données pendant cinq ans,
afin d’évaluer les ressources en or et en argent susceptibles d’être présente
», précise le ministère dans un communiqué.
Mieux encore, selon Le Parisien dans un article du 21 février, Arnaud
Montebourg a officialisé la création d’une compagnie minière nationale. Le
Ministre du redressement productif a annoncé un investissement de 200 à 400
millions d’euros pour la création de la Compagnie nationale des mines de
France (CNMF), en vue de protéger les intérêts du pays pour l’extraction de
métaux précieux.
Selon le ministère, « cinq opérateurs ont aujourd’hui montré leur
intérêt pour les ressources minières de notre sous-sol ». Huit demandes
d’autorisations pour des recherches seraient également en cours
d’instruction, qui concernent toutes le territoire métropolitain.
Cela signifierait donc que le sous-sol français cache encore de l’or ?
Avant la Seconde guerre mondiale, le gisement visé par Variscan a permis
l’extraction de plus de 10 tonnes d’or, entre 1905 et 1941. Un résultat qui
semble étonnant, au vu des kilos extraits des autres gisements : avant la
première guerre mondiale, la production totale du pays dépassait à peine 3
tonnes d’or. Et la mine du « Chapeau de fer », dans la Sarthe, a produit en
cinq ans près de 2 300 kg d’or et 7 000 kg d’argent.
L’or français, un or propre ?
L’extraction propre semble l’un des objectifs du ministère du redressement
productif, qui mise sur une extraction qui respecte « les aspirations
environnementales de nos concitoyens », souligne Arnaud Montebourg dans
son interview au Parisien.
Sur le territoire français, la question d’une extraction propre se pose
moins qu’en Guyane, par exemple, où l’orpaillage et l’usage intensif du
cyanure occasionnent des dégâts très importants sur l’environnement. Reste à
savoir pourtant dans quelle mesure le principe d’une extraction propre pourra être appliqué
en France : sans utiliser de produits chimiques et en s’engageant à des
exploitations non invasives et non nocives pour l’environnement, le modèle
économique est-il viable pour des gisements à faible teneur d’or ou d’argent
?
Quelles pourraient être les réserves d’or de la France… et où ?
Mieux cerner les réserves d’or souterraines de la France… et les
possibilités d’extraction : cela semble donc être l’objectif de la Compagnie
nationale des mines de France. Avec deux permis de recherches en cours sur le
sol métropolitain – et huit autres en cours d’instruction -, de nouveaux
gisements pourraient bien être exploités en France, près de quinze ans après
la fermeture de la dernière mine.
La Sarthe, la Mayenne et l’Anjou par exemple sont dans le viseur du
gouvernement. Mais pas uniquement. La CNMF ne se limitera pas au territoire
métropolitain, puisque la compagnie sera également appelée à se pencher sur
le cas de la Guyane, qui exploite déjà des gisements aurifères – mais dont
l’environnement comme l’économie pâtissent de l’orpaillage sauvage. L’or,
mais également toutes sortes de métaux précieux sont au menu des recherches :
argent, zinc, tungstène…
« Les pays d’Afrique francophone, notamment, aimeraient travailler
avec nous plutôt que d’avoir affaire à des multinationales étrangères »,
évoque encore Arnaud Montebourg dans l’interview donnée au Parisien. Le
projet du ministère du redressement productif semble pourtant bien loin d’un
altruisme débordant : l’objectif est bien d’assurer à la France des
ressources en métaux précieux, sans risquer de dépendre de pays qui ont déjà
fait leurs réserves en or… comme la Chine.
Un argument de plus en faveur de l’or déjà extrait !
Pour les particuliers, qu’est ce que cela signifie ? Un or sorti du
sous-sol français, probablement avec des méthodes d’extraction coûteuses,
peut-il changer la donne ? Non, parce qu’il ne sera pas en quantité
suffisante pour jouer sur le cours. Il s’agit plutôt d’un or qui ira grossir
les réserves d’or du pays. Mais cet intérêt du gouvernement suit bien les
derniers chiffres donnés par le World Gold Council, qui confirme la tendance
: 2014 sera l’année de l’or. Et de préférence, sous forme d’or déjà extrait,
en lingots ou en pièces d’or !