Dans une grande partie de ce qui
était autrefois surnommé le « monde libre », les gouvernements et
les économies sont aujourd’hui en phase d’autodestruction. D’ici peu de
temps, nous devrions assister à des révolutions dans un grand nombre de ces
pays.
Certaines de ces révolutions
pourraient s’avérer violentes, d’autres plus « douces » - au
travers de transformations majeures au sein de la structure politique. Elles
pourront varier, depuis l’imposition de nouvelles rhétoriques politiques jusqu’à
des transformations de gouvernements ou de leur structure.
Il n’est pas correct de penser
qu’une révolution est quelque chose qui se produit parce que l’ensemble de la
population n’est plus satisfaite. Ce n’est pas vrai. Une majorité des
révolutions se produisent lorsqu’une fraction d’une population (parfois un
dixième, un tiers ou plus) se mobilise suffisamment pour voir instaurés les
changements désirés.
C’est un point important, qui
nous rappelle que la révolution est assez souvent la conséquence de l’insatisfaction
d’une minorité. Si cette minorité parvient à établir un coup d’Etat, alors la
révolution a porté ses fruits. Les révolutions ne sont pas nécessairement
justes ou injustes d’un point de vue moral. Elles ne sont que des paris en
faveur de changements. Et dans de nombreux cas, ce ne sont que les visages qui
changent, et non les bases fondamentales de la gouvernance.
Mais en partant du principe que
les objectifs d’une révolution soient clairement établis (et non de simples
proclamations à la « Nous en avons assez »), nous pouvons observer
si ses objectifs ont été atteints.
Le fantôme des révolutions
passées
Penchons-nous brièvement sur les
révolutions américaine et française, qui se sont produites à peu près au même
moment. Les deux ont visé au renversement d’une monarchie qui était perçue
comme oppressive. La révolution américaine a été un succès, au travers de sa
défense des droits des individus, et a offert aux Etats-Unis un avenir
productif qui a duré assez longtemps. En revanche, la révolution française,
qui avait des objectifs similaires (« Liberté, Egalité, Fraternité »),
n’est pas parvenue à ses fins. Elle s’est trop concentrée sur la vengeance,
le pillage de la propriété de la nubilité et la demande de faveurs
politiques. En conséquence, elle a échoué à revitaliser la France et n’a pas
donné lieu à une ère de liberté et de productivité, mais plutôt à une ère de
corruption et de socialisme.
Pour comprendre pourquoi une
productivité accrue (en tant que sous-produit de la liberté individuelle) ne
s’est pas produite en France, il suffit d’observer la Déclaration française
des Droits de l’Homme, similaire au Bill of Rights américain. Les
clauses en sont quelque peu similaires mais l’abus né de la première était
depuis le début dans la farce. En voici deux exemples :
XIII. Pour
l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une
contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie
entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés.
Ce passage a très certainement
été rédigé par un comité. L’auteur original a pu être un Jefferson ou un
Madison français, puisqu’il est d’abord dit que les taxes devront être divisées
de manière égale, et qu’un amendement stipule ensuite « en raison de
leurs facultés ». Malheureusement, ce dernier passage réfute le principe
d’égalité, et a permis aux législateurs du futur d’y ajouter autant de
régulations socialistes qu’ils le souhaitaient. L’égalité a une définition
très claire, alors qu’ « en raison de leurs facultés » est
suffisamment vague pour permettre n’importe quel niveau d’inégalité désiré.
Au travers de cet amendement, les Pères fondateurs de la France n’avaient
aucune intention de favoriser la liberté et l’égalité, mais une France plus
concentrée sur l’habilitation.
XVII. La
propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si
ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige
évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité.
Même chose ici. Une déclaration
ferme relative aux droits des individus, diluée (une fois de plus, j’en suis
sûr, de la plume d’un comité) par « si ce n’est lorsque la nécessité
publique », pour permettre aux autorités de violer ce droit à leur bon
vouloir.
Une déclaration des droits qui
se contredit elle-même n’est pas une déclaration des droits. Notez que le
pamphlétaire britannique Thomas Paine (qui a assisté la révolution
américaine), a dit au sujet de la révolution française de l’époque, que :
Le gouvernement n’est
gouverné par aucun principe. Il peut faire du mal le bien et du bien le mal à
son bon vouloir. Le gouvernement est un pouvoir arbitraire.
C’est tout à fait vrai. Une
observation mémorable applicable à n’importe quel gouvernement actuel.
Le fantôme des révolutions du
présent
L’Argentine était autrefois un
pays en effervescence. Mais depuis Perón et son régime socialiste des années
1940, le pays a été en déclin perpétuel. Un nouveau président vient d’être
élu : Mauricio Macri, qui a promis de sauver l’économie en effondrement
au travers de mesures conservatives. Aux yeux d’une majorité des gens hors de
l’Argentine, une révolution douce a eu lieu : la promesse d’une
Argentine revitalisée. En revanche, pour ceux qui se sont trouvés au cœur de
la situation, la révolution était destinée à échouer. De l’autre côté du
fleuve, en Uruguay, avant les récentes élections, mon voisin Marcelo m’a dit :
Une majorité des Argentins reçoivent
des allocations, mais à mesure que Cristina continue de ruiner l’économie,
ces allocations deviennent de moins en moins importantes. Les gens sont en
colère, alors cette fois-ci, ils voteront pour un président conservateur. L’Argentine
deviendra pendant deux ou trois ans plus responsable sur le plan fiscal, et
le peuple demandera ensuite un retour au socialisme. Une majorité des gens se
moquent de la santé de l’économie. Ils veulent simplement du conservatisme
pour stabiliser leur pays, afin de pouvoir de nouveau recevoir leurs
allocations. C’est toujours la même chose.
En Argentine, ce même cycle ne
cesse plus de se répéter. Jusqu’à présent, aucune leçon n’a été apprise par
les électeurs. Les citoyens du pays ont-ils compris que les allocations sont
contre-productives au sein d’une économie vibrante ? Laisseront-ils une
chance à la prospérité en Argentine ? Ou donneront-ils au nouveau
président quelques années pour stabiliser l’économie afin de pouvoir de
nouveau demander des allocations ? Le temps nous le dira.
Le fantôme des révolutions
futures
Aux Etats-Unis, beaucoup parlent
de révolution. Beaucoup espèrent une révolution douce, qui pourra à nouveau
tourner leur pays vers ses valeurs traditionnelles, vers le travail et les
droits des individus au sein d’une société productive.
D’après moi, les choses ne se
passeront pas ainsi. La première révolution américaine a eu ces conséquences
exactes, mais la raison en a été (selon moi) l’absence d’habilitation au sein
de la société des colons. Ils sont arrivés en Amérique en tant que pionniers,
et tous étaient leurs propres champions. Ils ont accepté de travailler dur,
de ne compter que sur eux-mêmes et de chérir les droits individuels. Après la
révolution, les Etats-Unis ont connu une longue période productive, parce qu’une
majorité des Américains partageaient ces valeurs.
Malheureusement, ce n’est plus
vrai aujourd’hui. La liberté est un concept désirable aux yeux de tous, mais
qui implique de grandes responsabilités – des responsabilités qu’une majorité
de citoyens n’accepteront pas après la révolution. Comme en France, ils
voudront s’assurer de toujours conserver leur propre liberté, tout en
limitant celle des autres, afin que ces autres puissent être forcés à
contribuer au bien commun.
Une fois que l’idée selon
laquelle votre voisin devrait sacrifier sa liberté pour satisfaire vos
besoins ou désirs est enracinée dans la société, il est impossible de l’abolir.
Si nous recherchons le changement, il nous faudra le trouver dans un
recommencement total, libéré du bagage d’une population habilitée.