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Une quadrature du cercle de plus

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Publié le 12 octobre 2010
1717 mots - Temps de lecture : 4 - 6 minutes
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Rubrique : Editoriaux

 

 

 

 

Un clou chasse l’autre. C’est tout du moins ce que doivent se dire les grands de ce monde, dans l’espoir de ne pas répéter le triste spectacle de Washington, où a été mise en scène à leur corps défendant leur incapacité à ne serait-ce qu’avancer dans la solution de problèmes monétaires qui les dépassent.


Il s’agit cette fois-ci de se préparer au G20 de Séoul, dans désormais moins d’un mois, afin que les chefs d’État ne soient pas soumis à la même épreuve que leurs ministres des finances.


La ponctuation de la crise par ces grandes réunions internationales ne produit malheureusement plus son petit effet, après une intronisation qui a permis de présenter le G20 sous le jour d’un nouveau directoire mondial capable de tout prendre à bras le corps. Impliquant désormais de grands efforts de communication, afin de projeter une image positive de ses participants.


Quel thème flatteur les dirigeants du monde vont-ils pouvoir choisir afin de redonner l’impression qu’ils ont conservé l’initiative, alors qu’elle leur échappe à nouveau des mains ? Celui de la relance économique n’est plus propice à des manifestations d’unité, surtout si entretemps la Fed a annoncé qu’elle relançait la planche à billet, à l’inverse de la politique de réduction des déficits préconisée par la BCE. L’épineux sujet de la crise monétaire s’invitera quant à lui tout seul et ne pourra être éludé, ce qui est bien fâcheux. De grandes phrases bien senties sont en préparation, n’en doutons pas.


Nous assisterons alors à Séoul au retour d’une vieille connaissance, la thématique de la régulation financière. C’était prévu et c’est une aubaine. Car il est plus confortable d’aligner de nouvelles promesses et de jurer de ne plus se laisser prendre à la soudaineté d’une nouvelle crise, quand elle interviendra, que de prétendre indiquer comment sortir de celle qui se poursuit sans que l’on sache l’arrêter. Et d’être ainsi soumis à une insupportable obligation de résultat.


Les dossiers de la régulation financière sont très techniques, à l’image de la complexité de ce qu’elle prétend maîtriser, donnant l’occasion de s’y perdre ou permettant de présenter beau avec des effets d’annonce. L’échafaudage qui est péniblement construit au fil des mois de négociations, afin d’amortir la chute d’un système dont c’est semble-t-il le destin – puisque la prochaine serait inévitable, est-il déjà annoncé – est fait de bric et de broc. D’un empilement de mesures, dont aucune n’est à l’heure actuelle finalisée et beaucoup encore à l’étude, et dont le calendrier d’application s’étale sur plus d’une décennie.


Sa mise au point oppose les mégabanques aux régulateurs, soumis à de fortes pressions et concédants des compromis, confrontés à l’hétérogénéité d’un monde financier qui cultive ses particularismes tout en jouant dans la même cour; par construction rebelle à une réglementation unique en raison de sa diversité.


Bâle III a ouvert la danse, en proposant d’accroître les fonds propres des banques afin qu’elles puissent mieux résister à une nouvelle crise. Mais la définition des nouveaux ratios a déjà été entraînée par le diable dans le labyrinthe des détails. La réforme et l’harmonisation des normes comptables – ce couvercle qui permet de masquer le désastre des bilans bancaires, associé aux Special Purpose Vehicles nord-américains – fait du sur-place. Enfin, le dossier des banques trop obèses pour tomber (TBTF) va être ouvert à Séoul mais suscite déjà une virulente opposition de l’Institute for International Finance (IFF), canal habituel de revendication des mégabanques. Que reste-t-il à se mettre sous la dent pour Séoul ?


Le vaste monde du shadow banking (tout ce qui n’appartient pas expressément au monde bancaire dans le système financier) est toujours largement inexploré et paraît destiné à le rester. A la petite exception croyait-on des hedge funds, ces fers de lance toujours dérégulés de la finance, que les Européens ont eu des velléités d’encadrer. Suscitant les foudres américaines du secrétaire d’État au Trésor soi-même. Le dossier s’achemine désormais vers un discret compromis entre les deux parties, que seule la bienséance interdit d’appeler une capitulation. La délivrance du « passeport Européen » des hedge funds venus d’ailleurs pour jouer dans nos murs sera moins scrupuleuse que celle des permis de séjour et de la green card américaine…


Un os reste heureusement à ronger. Le traumatisme de la chute de Lehman Brothers et des mesures qui ont du être prises dans l’extrême urgence – afin d’éviter que tout le système ne s’écroule pas comme un château de cartes – n’est pas tout à fait effacé. Il est donc question de placer à la base de l’échafaudage un dispositif spécial dont le rôle a été défini mais la conception donne du fil à retorde. Il vise à permettre le démantèlement ordonné d’un établissement financier dans un contexte transfrontalier (international), en vue de dénouer la pelote de ses engagements réciproques avec ses confrères. En faisant le moins de vagues possibles.


Les mêmes causes produisant les mêmes effets, les Occidentaux sont en passe d’illustrer à leur façon le grand principe qui a fait la fortune du démarrage de la croissance chinoise du temps de Deng : « un pays, deux systèmes ». En l’appliquant au système financier international et au régime de démantèlement auquel il va être soumis. Pour aller à l’essentiel, les Américains veulent privilégier le démantèlement, mais pas sous l’enseigne de leur loi sur les faillites (le fameux chapitre 11) ; tandis que les Européens voudraient jouer les prolongations – comme ils le font actuellement – en maintenant en vie les banques malades.


Cela mérite que l’on s’y attarde, car c’est au moment où l’on veut mettre au point la touche finale à l’échafaudage que l’on s’aperçoit qu’il y a un vice de base dans sa construction. Quelle que soit la formule choisie, il faut en effet faire appel à la contribution des créditeurs – les investisseurs dans les obligations émises par les banques notamment – et c’est là que le bât blesse.


Aux États-Unis, la FDIC (l’agence gouvernementale qui garantit les dépôts des banques), propose de transférer les parties viables d’une banque en péril dans une entité qui continuerait à fonctionner (une good bank par opposition à une bad bank). Sa direction serait remerciée, ses actionnaires lessivés et ses créanciers non subordonnés subiraient une dépréciation de leurs avoirs. Nous y voilà.


Les Britanniques ne sont pas favorables à ce mécanisme, arguant du fait qu’il ne faut pas forcer une banque à la liquidation. De manière générale, les Européens proposent d’utiliser des instruments financiers tels que les obligations contingentes, automatiquement transformées en actions en cas de crise d’une banque et selon un critère convenu d’avance, afin de renforcer ses fonds propres. Ou des formules de sauvetage intitulées bail-in – par opposition à bail-out – qui reposent sur le mécanisme selon lequel une banque en péril se retournerait vers ses actionnaires et créanciers, sans faire appel aux fonds publics ni à une quelconque intervention des pouvoirs publics. Ce qui est beau comme un camion.


Cela soulève de sérieuses objections, car rien ne dit que les investisseurs se précipiteront pour acheter ces nouveaux produits financiers passablement scabreux : on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre ! Or il est prévu de faire appel à eux pour rester dans les clous réglementaires, quand le respect des nouveaux ratios de Bâle III deviendra obligatoire.


D’une manière plus générale, les deux conceptions se heurtent au même obstacle : faute de traité international, il sera difficile, voire impossible, d’obtenir la coopération d’États dont les banques devraient consentir de gros sacrifices pour avoir investi dans l’une de leurs consœurs liquidée et démantelée ou subissant un bail-in.


Les suites du sauvetage irlandais de l’Anglo Irish Bank donnent un avant-goût de ce qui pourrait se passer dans l’un ou l’autre des deux cas de figure. Le sort de ses détenteurs d’obligations non subordonnées n’est toujours pas réglé. Le gouvernement tentant de mettre en place une procédure de négociation à l’amiable entre la banque et ces créanciers, afin d’aboutir à une dépréciation qui serait votée majoritairement par eux et s’imposerait à tous. La réaction des marchés, réfugiés dans leur anonymat, est attendue sur le front des taux obligataires que l’État irlandais devra consentir en début d’année prochaine pour lever les capitaux dont il va avoir besoin. A moins qu’il ne fasse finalement appel au fonds de stabilité européen, en dépit de toutes les dénégations de part et autre.


Le gouvernement grec ne vient-il pas de reconnaître qu’il négocie « informellement » un report de remboursement de sa dette au FMI – ce que celui-ci a déclaré être prêt à envisager si les Européens en sont d’accord et font de même – tout en se refusant à admettre que l’on appelle cela une restructuration, un terme trop grossier et qui fait peur. Ce qui est vrai un jour cesse parfois de l’être le lendemain.


Les mots ont encore un dernier pouvoir, quand ils y parviennent. Celui de permettre des faux-semblants. Mais leur usage alimente un art de gouverner offrant de moins en moins de ressources.


Mais pour revenir à la régulation financière, il y a donc loin de la coupe aux lèvres ! Cahin-caha, l’échafaudage est monté, plus ou moins solide, mais quand va venir le moment de serrer les derniers boulons, il va falloir masquer qu’il repose sur du sable. Ne pas faire appel aux fonds publics tout en n’affrontant pas les marchés est une gageure.


Que va pouvoir dire le G20 sinon une fois de plus se réfugier derrière de grands principes ? Leurs modalités et calendrier d’applications risque d’être aussi incertaines et lointaines que l’est la réforme du système monétaire international. C’est quand, le G20 suivant ?


 





Billet rédigé par François Leclerc

 

Paul Jorion

pauljorion.com

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).


 

 

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