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La dette n’est pas soluble dans l’eau

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Publié le 23 novembre 2010
1403 mots - Temps de lecture : 3 - 5 minutes
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Rubrique : Editoriaux

 

 

 

 

Les voies de la crise ne sont pas impénétrables. Sans doute, le sauvetage de l’Irlande restera-t-il dans les livres d’histoire comme l’un de ses parfaits exemples, de la même manière que la fameuse tulipomanie sera à jamais une parfaite illustration de la spéculation.

Hier soir dimanche, un plan a été annoncé dans ses grandes lignes, qui va encore devoir être longuement mouliné nous est-il annoncé, sans que l’on comprenne bien ce qui justifie les délais invoqués. Sinon qu’il fallait sans attendre dire à tout prix quelque chose pour stopper la propagation de la crise, mais que des désaccords subsistent – la question de la taxation des bénéfices des entreprises, sujet de profonde discorde, n’est pas réglée – et qu’il faut du temps pour sonder le fonds du gouffre dans lequel les banques irlandaises se trouvent. Sans exclure que l’enveloppe de 80 à 90 milliards d’euros annoncé soit revue à la hausse à l’arrivée, quand l’examen de leurs bilans aura été mené à son terme. L’affaire, en tout cas, n’est pas bouclée et la colère monte.

Le cas de l’Irlande est donc un cas d’école. Deux raisons concourent à son sauvetage européen, lui-même justifié par la nécessité de protéger la zone euro. Et deux vecteurs possibles de contagion au sein de celle-ci ont été clairement mis en évidence. Le premier est l’interconnexion de l’endettement bancaire, le second celui du financement de la dette des Etats par les banques.

L’exposition des banques allemandes et britanniques à l’Irlande n’est pas un mystère. Les chiffres de la Banque internationale des règlements se passent de commentaires : 109 milliards pour l’Allemagne et 100 milliards pour la Grande Bretagne (40 milliards pour la France). Un des éléments de fragilité de l’édifice provient sans conteste du financement européen de l’expansion incontrôlée et de la dérive du système bancaire irlandais, lui même expression de la financiarisation accélérée de l’économie du pays.

Le second vecteur est tout aussi crûment exposé en vitrine. La perspective d’une crise prochaine de la dette publique irlandaise risquait d’entraîner dans celle-ci – avant même qu’elle ne se manifeste en Irlande – le Portugal puis l’Espagne. Car le Portugal doit se rendre sur les marchés au premier trimestre de l’année prochaine, avant l’Irlande dont le rendez-vous est fixé à la fin du second. Son entrée dans la zone des tempêtes y précipiterait l’Espagne, vu l’importance des relations économiques entre les deux pays et en raison du fait que l’Espagne est la suivante sur la liste.

La Grèce et l’Irlande sont désormais sous assistance, présentant à elles deux une parfaite image de la crise européenne. Le premier souffrant d’une dette publique hypertrophiée et la seconde d’une dette privée qui l’est encore davantage. A l’échelle européenne, le mélange des deux est comme on le constate détonnant, en dépit du fait que ces deux pays sont parmi les plus petits de l’Union. Ce qui illustre la très grande fragilité financière de l’Europe, dont l’origine est connue : tout le monde se tient à ce petit jeu de la barbichette. Aucun pays ne peut être laissé à lui-même.

L’autre point commun entre ces deux pays est apparent : le remède qui est employé va à chaque fois tuer le malade. Les aides financières qui sont accordées ne peuvent régler le problème que représente l’insolvabilité des Etats face aux dettes publiques et privées qu’ils sont sommés d’assumer. En Grèce, la publication du nouveau plan gouvernemental est reculée d’un petit jour, il va faire plus que grincer les dents. En Irlande, il devait l’être également mardi, mais un retard n’est pas à exclure en raison d’élections partielles le 24 novembre prochain, la presse canonnant sur la reddition gouvernementale. La vérité est de plus en plus difficile à dire.

Mais l’histoire n’est pas finie. « A qui le tour  ? » n’est pas la seule question qui se pose désormais. Il faut plutôt se demander « où la crise européenne va-t-elle s’arrêter, qu’est-ce qui va le permettre ? ». Une interrogation que se posent déjà les Américains, dont les responsables suivent de près les événements, en raison de leur incidence sur leur économie.

Une première manière d’y répondre est de constater que le mécanisme de crise actuel n’est pas dimensionné de manière satisfaisante pour y répondre. L’enveloppe financière de 440 milliards d’euros prévue peut-elle répondre aux besoins exprimés par la totalité des plans de sauvetage qui risquent de devoir être entrepris ? Le réaction des marchés à l’accroissement de cette demande est toute aussi incertaine, risquant de générer une hausse des taux auxquels le fonds de stabilité (EFSF) empruntera, répercutée sur les pays bénéficiant de son aide, rendant ensuite son remboursement encore plus aléatoire. Les pressions politiques – exercées notamment par les Allemands – ne concourant pas non plus à leur baisse. Alors que la Suède, qui pourrait aux dernières nouvelles prêter entre 500 millions à un milliard d’euros à l’Irlande, annonce vouloir y appliquer un taux de 3%…

Un autre mécanisme doit donc être mis en place, dont on connaît déjà deux caractéristiques : il doit être permanent et doit prévoir la participation des créanciers à son financement. Mais la route est longue pour y parvenir et les obstacles nombreux. Ce mécanisme peut-il être prêt à temps ? c’est loin d’être chose garantie. Au bridge, les impasses ne marchent pas à tous les coups.

Pour autant, y a-t-il une autre manière d’y faire face ? Théoriquement, il y en a trois. 1/ Déléguer le problème au FMI, ce qui revient à mutualiser au niveau international la crise européenne. 2/ Engager résolument la BCE dans un programme d’achat de la dette publique. 3/ Restructurer celle-ci afin de s’attaquer à la dette privée supportée par les banques.

Il va de soi que cette dernière option, celle qui s’imposerait, sera la première a être écartée. Mais ne faudra-t-il pas y venir ?

La première option a quant à elle pour conséquence d’accroître les besoins financiers du FMI et implique de solliciter les pays disposant d’importants surplus, au premier rang desquels la Chine. S’engager sur cette voie, c’est accélérer le processus de réforme du système monétaire européen et accroître les contradictions d’intérêt entre les Européens et les Américains, qui ont tout à y perdre. La voie semble donc barrée.

La seconde revient à ce que la BCE rejoigne le choeur des banques centrales et se résigne à pratiquer sur le second marché ce qu’elle n’a pas le droit de faire sur le marché primaire : financer la dette des Etats. En ne se limitant pas aux volumes actuels d’achats ni à son soutien déguisé via le système bancaire, ce robinet à liquidité qu’elle voudrait continuer à fermer. Cette option est aujourd’hui inconcevable, en raison du veto des Allemands. N’ayant d’autre choix que la peste ou le choléra, ceux-ci le maintiendront-ils lorsque le château de cartes européen donnera des signes d’effondrement ? Sans prétendre jouer les devins, ce chemin-là pourrait être plus probablement emprunté, tout simplement parce qu’il correspond à la ligne de plus grande pente et qu’il est – même relativement – celui de la facilité.

Le pire est-il toujours sur ? La réponse est assurément non, il est seulement possible. Mais une constante s’est manifestée depuis le début de la crise, qui ne se dément toujours pas : les bonnes solutions ont été systématiquement écartées au profit des mauvaises. Protéger à tout prix le système financier a été érigé en priorité, en tentant de faire croire que l’instrument du désastre était le sauveur. Une aveugle fuite en avant a tenu lieu de politique, laissant se poursuivre l’implosion du système et exposant de manière caricaturale le cousinage au premier degré des représentants des Etats avec celui-ci.

Hélas pour eux, la dette n’est pas soluble dans l’eau.


Billet invité : François Leclerc



Paul Jorion

pauljorion.com



(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.



Paul Jorion, sociologue et anthropologue, a travaillé durant les dix dernières années dans le milieu bancaire américain en tant que spécialiste de la formation des prix. Il a publié récemment L’implosion. La finance contre l’économie (Fayard : 2008 )et Vers la crise du capitalisme américain ? (La Découverte : 2007).


 

 

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