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J’ai évoqué à
plusieurs reprises les problèmes environnementaux posés par
l’orpaillage (1,2
et 3).
Je propose ici d’élargir la discussion à d’autres
dilemmes environnementaux. Le sujet d’actualité qui
s’impose est celui des terres rares : un groupe de 17
métaux (Scandium, Yttrium et 15 Lanthanides), qui représentent
des matières premières indispensables à la production
des nouvelles technologies employées dans l’industrie civile et
militaire. Les usages des terres rares vont des écrans plasma aux
missiles de croisière en passant par les panneaux
photovoltaïques.
Au cours des
derniers mois, la presse nationale et internationale s’est faite
l’écho de la décision du gouvernement chinois de limiter
la production et de restreindre l’exportation de ces métaux.
Alors que l’attention publique se concentre habituellement sur les
questions géopolitiques et stratégiques pour expliquer la
manière dont ces restrictions risquent d’affecter la production
de nouvelles technologies et, plus spécifiquement, les industries de
défense, la question peut-être la plus simple et la plus
évidente a été mise de côté. Pourquoi la
Chine détient-elle un monopole de
facto de la production mondiale de terres rares, alors qu’elle
possède à peine la moitié des ressources mondiales
connues ? La réponse à cette question nous permet de
comprendre implicitement l’hypocrisie qui sous-tend les discours
écologistes.
Contrairement
à ce que semble indiquer leur nom, les terres rares ne sont pas plus
rares que certains métaux couramment utilisés comme par exemple
le cuivre. Leur éparpillement rend toutefois leur isolation difficile,
tandis que leur raffinage nécessite de nombreux produits chimiques qui
empoisonnent durablement les sols. C’est précisément en
raison de ces problèmes de pollution que les États-Unis, le
Canada et l’Australie ont depuis longtemps abandonné
l’extraction de ces minerais. La mine de Mountain Pass en Californie, ouverte en 1952, a
ainsi dû fermer en 2002 après avoir fourni une large partie de
la production mondiale dans les années 60 et 80, notamment du fait des
exigences environnementales imposées par le gouvernement
américain.
Quand
l’on sait que le terbium est indispensable aux lampes à basse
consommation, que les diodes électroluminescentes ne peuvent pas être produites
sans gallium, que les cellules photovoltaïques
contiennent de l'indium et que les générateurs d'éoliennes ou encore la
plupart des moteurs des voitures électriques dépendent
du néodyme, les discours sur les énergies dites
« vertes » perdent soudainement leur substance. En
s’empressant de subventionner les énergies renouvelables
(éolienne et photovoltaïque), les gouvernements occidentaux
augmentent implicitement la demande de terres rares qu’eux mêmes s’empêchent de produire.
L’éco-blanchiment
des politiques environnementales occidentales est actuellement l’une
des causes de la pollution engendrée par des régimes
autoritaires qui, eux, font fi des droits de propriété et ne
sont pas gênés de nuire à leurs propres
administrés. Cette hypocrisie environnementaliste prend actuellement
une nouvelle dimension, à l’aune du défi
stratégique que les démocraties occidentales pensent affronter
dans le contexte des restrictions chinoises aux exportations de terres rares.
Il est ainsi intéressant de noter que les exigences environnementales
qui avaient conduit à la fermeture de Mountain Pass ont récemment
été mises entre parenthèses par le gouvernement
américain, qui a attribué à l’entreprise Molycorp les licences nécessaires pour recommencer
l’extraction des terres rares sur le même site, tout en
continuant de stimuler la demande en subventionnant la production et la
demande d’énergies renouvelables.
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