Après
avoir abordé la question de l’augmentation de la TVA dans le
bâtiment dans un précédent article, abordons maintenant,
la question des auto-entrepreneurs.
Selon les artisans du bâtiment, les auto-entrepreneurs leur font
une « concurrence déloyale » car ils ne sont pas
soumis à la TVA et paient des charges réduites.
Rappelons, tout d’abord, que le statut d’auto-entrepreneur
a été créé avec deux objectifs : réduire
le « travail au noir » d’une part, et permettre
à des individus qui ont une activité (salariée
notamment) de compléter leurs revenus par une autre activité
professionnelle d’autre part. Pour cela, les formalités de
création sont simplifiées, ainsi que les déclarations et
paiements des cotisations sociales et impôts.
La formule a eu un succès dès sa création en
2008. À ce jour, selon les derniers chiffres disponibles, près
de 900 000 personnes ont choisi l’auto-entreprise, même si
seulement environ 400 000 déclarent du chiffre d’affaires.
Ajoutons que le chiffre d’affaires mensuel moyen
déclaré par ceux qui ont réellement une activité
était de 1 055 € au premier trimestre 2013. Parmi ceux-ci, seuls
7,6 % ont déclaré plus de 2 000 € de chiffre d’affaires
mensuel.
La CAPEB ne conteste pas le bien-fondé du statut
d’auto-entrepreneur en général. Non, ce qu’elle
souhaite c’est sa disparition pure et simple dans le secteur du
bâtiment. Une idée reprise par sa confédération,
l’UPA (Union professionnelle artisanale), qui entend interdire
l’auto-entreprise dans l’artisanat.
Les
arguments des artisans du bâtiment n’ont que peu de consistance. En effet,
avec environ 1 000 € de chiffre d’affaires moyen par mois,
l’auto-entrepreneur est sous le smic net (environ 1 120 €).
Même s’il semble que ce chiffre soit légèrement
plus élevé dans le secteur de la construction (autour de 1 310
€), cela reste faible. Et n’oublions pas que le chiffre
d’affaires, à lui seul, ne préjuge pas des revenus
tirés de l’activité d’auto-entrepreneur : il
faut considérer les coûts engagés, qui peuvent être
assez élevés dans le bâtiment.
Dans un rapport d’avril
2013, l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales)
et l’IGF (Inspection générale des finances) tordent
définitivement le cou à cette idée de
« concurrence déloyale » en indiquant que les 67
000 auto-entrepreneurs actifs dans la construction génèrent un chiffre
d’affaires de 47,5 millions d’euros , soit 0,7 % du chiffre
d’affaires des entreprises du bâtiment de moins de 20
salariés.
Les deux inspections générales affirment même
« qu’il est probable que les auto-entreprises se
positionnent de manière préférentielle sur des micromarchés
délaissés par les autres entreprises ou sur lesquels elles font
des profits limités ; il n’y a pas de redondance, mais
plutôt complémentarité avec les autres
régimes ».
Bref, en deux mots comme en cent, les auto-entreprises ne
concurrencent pas vraiment les artisans. Pourquoi, dans ce cas, demander leur
suppression ?
On peut voir dans cette requête une manifestation de
l’aversion française pour la concurrence (lire l’article de Laurent
Weill dans Les Echos). Certains
pensent que les artisans craignent de devoir s’expliquer davantage sur
leurs tarifs et d’abandonner quelque facturation « au
noir » ! Peu importe, après tout.
Mais quel
serait le bon combat ?
Ce pourrait être celui de Jean-Pierre Gorges, le
député-maire de Chartres, qui propose d’étendre le
régime des auto-entrepreneurs aux artisans. Selon le
député, cela « permettrait à cette profession de
mieux exister, de générer de la valeur ajoutée et donc
de la croissance. Les artisans sont étranglés, ils ont
largement besoin de cette mesure».
Bref, la simplification et l’extension des
« avantages » de l’auto-entreprise à tous.
On se demande pourquoi cette idée n’est pas venue aux
organisations professionnelles.
Au fait, qu’en pensent la CAPEB, l’UPA et la FFB ?
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